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À La Une - Dramathérapie

Liban : Les « Sheherazade » ont fait pleurer les murs de la prison de Baabda

Après Roumieh, Zeina Daccache a donné la parole aux prisonnières de Baabda qui ont crié haut et fort leurs douleurs, leurs craintes et leurs espoirs.

Les détenues de la prison de Baabda, en tenue de représentation.

Présentée hier après-midi, la pièce théâtrale qui aura lieu par la suite les 19, 20, 21, 26, 27 et 28 avril ainsi que les 3,4,5,10 et 11 mai n’est pas une adaptation comme Les douze Libanais en colère de Roumieh mais bien un scénario original écrit par Zeina Daccache elle-même. Après son expérience réussie à Roumieh qui avait aidé beaucoup de détenus à se sentir mieux dans leur peau et à amorcer une certaine insertion si ce n’est dans la société, du moins dans les rapports avec les autres, Daccache réitère l’expérience. Depuis donc le mois de juillet 2011, l’actrice libanaise, dramathérapeute et directrice exécutive de Catharsis – seule association (à but non lucratif) se consacrant à la « dramathérapie » au Liban et au Moyen-Orient – avait lancé un nouvel atelier avec les détenues de la prison des femmes à Baabda. Au bout du compte, des petites saynètes composées de monologues et scènes écrits par les détenues inspirés de la vie de chacune des vingt prisonnières qui vont raconter en paroles, en chansons, en cris, en danses, en mimes et en larmes et rires leurs mésaventures, leur vie jalonnée de souffrances.

 

Bienvenue au royaume de Baabda

Sous une lumière violacée, les invités grimpent les escaliers qui mènent à une petite salle, que dis-je, chambrette, où a lieu la représentation. C’est apprendra-t-on plus tard le seul lieu de promenade où se rassemblent plus de quatre vingt-dix femmes tous les jours pour respirer un peu. On apprendra également que ce moment de « récréation » a lieu parmi des prisonnières qui cuisinent et d’autres qui font la vaisselle ou étendent le linge. C’est là encore qu’ont eu lieu toutes les répétitions. « Dans des conditions désagréables, dira Zeina Daccache. Heureusement qu’on a pu arriver à bout. » Une seule grande fenêtre à barreaux les sépare du monde libre...de l’air libre.

 

Elles sont vêtues de noir agrémenté de longs foulards en couleurs. Durant une heure quarante-cinq minutes Fatmé Younès, Amal, Sam D, Najwa H, Zeinab D, Christelle Khairallah, Lisa Tarbayn, Fatmé Sabra, Maryam Z, Nisrine Kh, Maro, Joanna Sayyah, S. Zgheib, Caroline Borghol et Victoria S. deviendront des « Scheherazade » avec la magie des histoires en moins. Car les contes qu’elles vont narrer ne sont pas drôles et ce ne sont certainement pas des histoires pour enfants. Elles ont accompli des crimes, des délits. Elles ont touché à la drogue. Mais leur plus grand crime c’est d’avoir très tôt perdu leur enfance et par la suite leur féminité et leur humanité. Elles sont là toutes égales devant l’injustice. Car est-ce vraiment leur tort d’avoir été battues, violentées, molestées, humiliées, ballotées entre des parents injustes, des maris violents et une justice encore inéquitable ? Est-ce leur tort d’être nées dans un pays oriental, dans un système patriarcal où la femme est souvent traitée comme une citoyenne de seconde zone ?

 

Zeina Daccache n’a pas fondé son texte uniquement sur l’incarcération des femmes mais sur la condition féminine et sur les maltraitances quotidiennes qui ont conduit à leur présence derrière les barreaux. Une prison, initialement conçue pour accueillir 30 à 40 détenues et qui renferme aujourd’hui 60 à 70 prisonnières, dont la plupart attendent toujours leur verdict !!

 

Les détenues ont clôturé leur spectacle par une dabké et une atéba exceptionnelles . Le ministre de la Justice s’est dit avoir été très touché par la performance. Quant à Zeina Daccache, elle a remercié tous les cadres, les associations, les présents, notamment Ziyad Baroud et Ghassan Moukheiber qui, par leurs encouragements et leur appui inconditionné, ont permis à ce projet de survivre. Un petit café a enfin réuni le public et les prisonnières dans ce royaume de Baabda où pour quelques instants, il faisait bon vivre.

Présentée hier après-midi, la pièce théâtrale qui aura lieu par la suite les 19, 20, 21, 26, 27 et 28 avril ainsi que les 3,4,5,10 et 11 mai n’est pas une adaptation comme Les douze Libanais en colère de Roumieh mais bien un scénario original écrit par Zeina Daccache elle-même. Après son expérience réussie à Roumieh qui avait aidé beaucoup de détenus à se sentir mieux dans leur...
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