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À La Une - Éclairage

Le rôle de la Turquie sur la sellette dans l’affaire des pèlerins enlevés

L’affaire des onze pèlerins enlevés près de la frontière entre la Syrie et la Turquie continue de faire la une des médias libanais, et la visite du Premier ministre Nagib Mikati à Istanbul laisse présager des développements positifs, même si les proches du chef du gouvernement refusent pour l’instant de se prononcer et encore moins de donner de l’espoir à leurs familles.


Même mutisme du côté du Hezbollah et d’Amal qui se contentent d’affirmer que les contacts restent maintenus, mais que la discrétion est nécessaire. Ce qui est sûr désormais, c’est que les autorités turques sont directement impliquées dans les négociations, alors qu’au cours des premiers jours suivant l’enlèvement, elles refusaient de se déclarer comme l’interlocuteur privilégié, livrant la scène médiatique à des intermédiaires ou à des chefs de faction plus ou moins inconnus, qui ont chacun une liste de revendications, qui commencent par l’envoi d’armes à l’opposition syrienne, passant par un changement de la position du Hezbollah à l’égard des développements en Syrie.


De son côté, le Hezbollah refuse de se laisser entraîner dans un bazar de négociations, dans le genre de ce qui se passait avec les parties occidentales pendant la période dite « des otages étrangers » dans les années 80. Il refuse aussi de céder aux provocations. À ce sujet, des sources autorisées démentent les informations selon lesquelles le pèlerin Abbas Cheaïb serait un cadre du parti. Une photo de ce dernier serait en train de circuler, dans laquelle il apparaîtrait posant au volant d’un véhicule militaire israélien pris pendant la libération du Sud en 2000. Des sources proches du parti parlent d’un trucage photographique destiné à présenter le pèlerin comme un combattant, ajoutant que, de toute façon, en mai 2000, dans l’euphorie de la libération, des jeunes ont pu se faire photographier devant les équipements militaires laissés par les soldats israéliens au cours de leur retrait précipité du Liban. À cause de cette rumeur sur son appartenance au Hezbollah, Abbas Cheaïb est devenu le plus médiatisé des onze pèlerins.


Nabil el-Halabi, directeur de l’Organisation libanaise pour la démocratie et les droits de l’homme, a récemment présenté une prétendue photo de Cheaib les yeux bandés et la tête baissée, qui lui aurait été remise par l’opposition syrienne. Diffusée par la LBCI, la photo est suffisamment dérangeante pour pousser les familles des pèlerins et le Hezbollah à une réaction vive face à l’humiliation qu’aurait subie le pèlerin enlevé. Mais son authenticité a été rapidement contestée et la LBCI a même rappelé qu’elle a été sans doute prise par les soldats américains en Irak, lors du scandale de la prison d’Abou Ghraib, précisant, photos à l’appui, que le prisonnier aux yeux bandés ne ressemble pas du tout à Abbas Cheaïb. Le trucage grossier viserait donc à provoquer une nouvelle fois une discorde confessionnelle entre les Libanais...


Des sources proches des familles des pèlerins annoncent toutefois que la patience de ces dernières n’est pas sans limites, et si les négociations n’avancent pas, elles songeront à organiser un sit-in devant l’Escwa au centre-ville tout près de celui des familles des détenus libanais en Syrie. Ce qui les retiendrait encore, c’est d’abord les appels à la retenue des commandements d’Amal et du Hezbollah, et la conscience de l’existence d’un plan visant à menacer la paix civile au Liban, ainsi que les promesses véhiculées par les milieux officiels au sujet d’éventuels développements positifs après la visite de Mikati en Turquie. Les familles des pèlerins sont d’ailleurs convaincues que la Turquie peut jouer un rôle-clé dans ce domaine, d’autant que le lieu où l’enlèvement s’est produit fait partie de la zone surveillée par l’armée turque à quelques kilomètres de la frontière syrienne. Même si la diplomatie turque n’est peut-être pas informée de ce qui se passe dans cette zone, les services de renseignements turcs y seraient, eux, très actifs. Ils devraient donc forcément avoir des informations, ou au moins des pistes sérieuses concernant le sort des pèlerins enlevés.


Leurs familles se demandent à cet égard pourquoi la Turquie, qui participe à la Finul avec un important contingent et qui s’est souvent déclarée en faveur de la stabilité au Liban, accepte d’être mêlée à une affaire qui est avant tout humanitaire. Les familles attendent donc les nouvelles en provenance de Turquie et elles ne croient plus du tout au sérieux de tous ceux qui, depuis plus d’une semaine, se présentent comme des intermédiaires ou des interlocuteurs possibles. En même temps, elles se demandent pourquoi les autorités turques feraient un cadeau au Premier ministre Négib Mikati en lui donnant des informations sur le sort des pèlerins enlevés au lieu de les garder pour Saad Hariri qui reste plus proche d’elles politiquement. Pour ces raisons, les familles n’osent pas trop espérer et craignent que le dénouement de cette histoire ne se fasse attendre, d’autant que la situation en Syrie devient chaque jour un peu plus dramatique alors que le bras de fer régional et international se poursuit et ne semble pas près de se transformer en confrontation directe ou aboutir rapidement à un compromis.

 

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