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À La Une - Journée de la femme

La honte au Parlement : la loi sur la protection de la femme revue à la baisse

La sous-commission parlementaire chargée d’examiner le projet de loi sur la protection de la femme contre la violence domestique qualifie d’« exploit » la nouvelle mouture de ce projet. La Coalition nationale pour la promulgation d’une loi protégeant la femme de la violence domestique émet des doutes et répond...

Mardi, le président de la sous-commission parlementaire chargée de l’examen du projet de loi visant à protéger la femme contre la violence domestique, Samir el-Jisr, a annoncé que la sous-commission a achevé sa mission et que la nouvelle mouture du projet de loi « nécessite une dernière relecture avant d’être soumise » aux commissions parlementaires mixtes puis « à l’Assemblée nationale ». M. Jisr a précisé que le nouveau texte est « équilibré » et « moderne », qu’il « protège la cellule familiale » et « ne va pas à l’encontre de la charia islamique ».

 

En fait, c’est un cadeau empoisonné que les parlementaires de la commission ont fait à la femme libanaise, cruauté du sort, à deux jours de la Journée internationale de la femme, célébrée aujourd’hui. Le texte original a été, en effet, tellement amendé qu’il a été dénaturé et ne concerne plus la catégorie à laquelle il était destiné au départ, à savoir la femme libanaise. Désormais, il englobe tous les membres de la famille (femme, homme ou enfant), victimes de violences domestiques mais ne donne pas à la femme, loin de là, la parité dans ce domaine avec l’homme.

 

D’ailleurs, la sous-commission parlementaire a maintenu l’article 26, ajouté, rappelons-le, à la demande de l’ancien ministre du Hezbollah, Mohammad Fneich, lors du Conseil des ministres tenu en avril 2010. Selon cet article, « la femme peut porter les cas de violence conjugale et familiale devant les tribunaux civils, uniquement dans le cas où les tribunaux religieux le permettent ».

 

La clause concernant le viol conjugal a été également abolie, « toutefois les membres de la sous-commission essaient de trouver une formule pour le pénaliser », a-t-on appris de source parlementaire.

 

Il en est de même pour les délits prévus dans le code pénal qui ne seront pas englobés dans la nouvelle loi, notamment la violence psychique, morale et économique contre la femme. « Une clause qui devrait être encore révisée au cours des prochaines séances », selon la source.

 

La sous-commission parlementaire a également aboli l’article 6 qui élargit le cercle des personnes qui peuvent rapporter ou signaler une violence domestique.

 

L’article 15 qui stipulait le transfert de la femme victime de violence domestique et ses enfants à un endroit sûr ou dans une maison d’accueil a été également amendé. Selon les changements apportés, « l’accusé s’engage à ne plus agresser la victime et les autres membres de sa famille sous peine de lui interdire l’accès de la maison pour une période n’excédant pas 48 heures ou de le mettre aux arrêts pour la même période ».

 

Enfin, selon l’article 17, également amendé, « une demande de protection peut être faite devant le juge des référés », ce qui, selon Leila Awada, avocate et membre de l’ONG Kafa, « ôte au délit son caractère pénal puisque le juge des référés ne statue que sur les affaires civiles ».

 

Régression

« Cette nouvelle mouture du texte du projet de loi est une régression et nous fait perdre le peu de droits dont nous disposons, s’insurge Leila Awada. Selon le code pénal, une femme maltraitée peut présenter une plainte pour coups et blessures au tribunal. Or conformément au nouveau projet de loi qui accorde la priorité aux statuts personnels, une femme victime de violence domestique pourrait ne pas avoir le droit de présenter une telle plainte si le juge, en l’occurrence un juge religieux, estimait qu’il s’agissait de coups à caractère correctionnels et non de coups violents ayant causé des lésions ! »

 

Au lendemain des propos tenus par M. Jisr, la Coalition nationale pour la promulgation d’une loi protégeant la femme de la violence domestique a publié un communiqué réitérant ses revendications : une loi consacrée à la femme pour la protéger de la violence domestique, « d’autant que la violence est exercée sur la mère, l’épouse, la sœur, la fille, la petite-fille et la grand-mère parce qu’elles sont des femmes ». « Oui, nous sommes déterminé(e)s à protéger les femmes de toutes formes de violence domestique, y compris la violence sexuelle qui se traduit par le fait d’obliger l’épouse par la force à accepter l’acte sexuel, obligation que certains députés considèrent comme étant un droit acquis à l’époux », ajoute le texte.

 

En réponse à M. Jisr qui avait déclaré que la version originale du projet de loi « était en contradiction avec la Constitution et le cadre général des politiques pénales », la Coalition affirme à ce propos : « Ce qui entre en contradiction avec la Constitution c’est le fait d’accorder aux tribunaux chériés et religieux, qui sont des tribunaux extraordinaires, de plus grandes prérogatives que celles de l’État, mais aussi le fait d’accorder aux jugements de ces tribunaux une priorité à ceux des tribunaux pénaux. Il s’agit d’un précédent dangereux qui met le code pénal sous le contrôle des tribunaux chériés et religieux ! »

 

Pression

La Coalition conclut en soulignant que la nouvelle mouture du projet de loi pour la protection de la femme contre la violence domestique n’a rien d’un « exploit », d’autant qu’il « n’est plus spécifique à la femme » et qu’il « ne reconnaît pas le problème que pose la violence faite à la femme, voire il autorise les formes de violence les plus terribles comme le viol conjugal et la violence psychique et économique ».

 

La Coalition nationale pour la promulgation d’une loi protégeant la femme de la violence domestique ne restera pas les bras croisés. Leila Awada déclare dans ce cadre qu’une campagne médiatique a déjà été lancée. Celle-ci dénonce la mainmise des communautés sur la décision des parlementaires.

 

De plus, « nous allons exercer des pressions sur les différents blocs parlementaires, même ceux qui ne sont pas présentés dans la sous-commission parlementaire afin qu’ils rejettent ces amendements », explique-t-elle. « Nous ferons tout ce qui est notre pouvoir pour interdire que ce projet de loi dans sa nouvelle version soit votée à la Chambre », conclut-elle.

 

Mardi, le président de la sous-commission parlementaire chargée de l’examen du projet de loi visant à protéger la femme contre la violence domestique, Samir el-Jisr, a annoncé que la sous-commission a achevé sa mission et que la nouvelle mouture du projet de loi « nécessite une dernière relecture avant d’être soumise » aux commissions parlementaires mixtes puis « à...

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