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À La Une - Aménagement urbain

Des jardins suspendus à Beyrouth ?

Un architecte envisage la plantation d’arbres sur les toits de la capitale pour assainir l’air de la ville.

Il n’est pas difficile de s’expliquer qu’une ville aussi peu industrielle que Beyrouth soit tant polluée. Ouvrir les yeux et observer les pratiques à quatre roues motrices pour un automobiliste donne sans doute une partie de la réponse. De plus, le processus d’urbanisation a ménagé peu de lieux publics réservés aux espaces verts. Quand 20 000 immeubles étouffent une poignée de parcs, l’équation ne favorise pas le bilan carbone. Face à cette situation, la question est claire : comment domestiquer une pollution déjà essentiellement domestique ? Wassim Melki, jeune architecte de 28 ans, tente d’y répondre en lançant un projet mettant à profit les faiblesses de la ville, et impliquant l’engagement des habitants pour susciter l’évolution des comportements. L’idée d’une « Beirut Wonder Forest » (Forêt merveilleuse de Beyrouth) est simple : il s’agit d’imaginer des milliers d’arbres qui viendraient occuper les toits de l’agglomération entière, installés et entretenus par les habitants de chaque construction.

 

Contrairement aux expériences existantes en Allemagne ou au Japon, le dessein est relativement économique, puisqu’il n’a pas pour ambition de planter des arbustes à même une terre installée sur des toits repensés, mais seulement d’apposer des pots sur les toits existants. Ceci évite aussi les problèmes potentiels de drainage et de structure tout en possédant l’avantage beyrouthin de la souplesse. Quant au vent, des câbles fins limiteront ses effets en soutenant les arbres. Les plantations pourront être faites une fois sur les toits, réduisant le coût et rendant praticables des zones à difficile accès. Selon M. Melki, le temps n’est pas un problème, il est même le principal attrait du projet, qui peut voir les arbres pousser.

 

Il est difficile de mesurer l’effet réel sur la qualité de l’air, mais il devrait être bénéfique, si l’on sait que chaque arbre pourrait en moyenne retenir 10 kg de CO2 par an. Plus ils seront nombreux, plus le concept aura de sens. Par ailleurs, des retombées sur le climat local devraient se faire sentir, du fait de l’ombre projetée par les arbres. Cela pourrait indirectement favoriser la baisse du niveau de pollution de la ville : en été, un adoucissement de la température est souvent synonyme de consommation d’énergie plus modérée, sur les polluants systèmes de climatisation en particulier. Esthétiquement, Beyrouth ne semble pas perdre au change selon les images virtuelles de « BWF ». D’ailleurs, lorsqu’on objecte qu’une main leste à Photoshop est peut-être responsable du résultat visuel flatteur, M. Melki lance vertement : « L’entreprise achevée sera certes moins artistique mais elle sera réelle : je pense donc qu’elle va être plus belle. »

 

Beyrouthopie ?

Cependant, une vision plus terre à terre rappelle que les problèmes pratiques sont nombreux. La principale difficulté sera de faire connaître le projet aux Beyrouthins dans un premier temps, puis de les convaincre de son intérêt pour qu’ils lui laissent un peu de temps et d’argent. Car si le résultat sera visible à l’échelle de la ville entière, l’initiative et l’entretien devront être individuels (ou collectifs à l’échelle des immeubles). Ceci n’est pas un détail, et une ONG devrait voir le jour d’ici peu afin de concrétiser une ambitieuse volonté d’installation dès 2013-2014. Quant au financement des arbres, « BWF » espère que les entreprises du domaine profiteront de cette occasion pour promouvoir leur image et permettre à chacun d’avoir raisonnablement accès au programme. Mais, sur ce point essentiel, la question paraît encore problématique.

 

Pour convaincre la population d’adhérer, les arguments foisonnent sur Internet, puisque de nouvelles habitudes de vie pourraient voir le jour. Sur un deuxième sol, des espaces semi-publics inutilisés deviendraient lieux de vie. Aussi, les arbres plantés devraient être ceux qui sont adaptés au climat local. En d’autres termes, des arbres producteurs de fruits (oliviers, grenadiers, etc.) pourraient générer des récoltes à destination domestique ou commerciale.

Mais, d’après M. Melki, la voie la plus efficace serait l’incitation politique, par une obligation légale, ou plus raisonnablement par des déductions d’impôts aux participants. Le prototype qui sera terminé fin janvier d’un immeuble dans le secteur de Badaro aura une importance capitale pour éprouver la solidité du projet avant de le présenter au monde politique. Ainsi, le résultat sera soumis au ministère de l’Environnement. Puis, les toujours plus nombreux convaincus de « BWF » envisagent de tester un quartier entier, qui reste à définir. Avant de voir, un jour peut-être, Beyrouth unifiée pour ceux qui la voit d’en haut ?

 

 

Il n’est pas difficile de s’expliquer qu’une ville aussi peu industrielle que Beyrouth soit tant polluée. Ouvrir les yeux et observer les pratiques à quatre roues motrices pour un automobiliste donne sans doute une partie de la réponse. De plus, le processus d’urbanisation a ménagé peu de lieux publics réservés aux espaces verts. Quand 20 000 immeubles étouffent une...

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