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Liban - Scrutin

Élection demain d’un nouveau bâtonnier, sous le thème d’une indépendance soutenue...

Les élections demain au conseil de l’ordre des avocats testeront l’indépendance effective d’une profession libérale, aux prises avec une politisation de plus en plus exacerbée.

Les élections demain au conseil de l’ordre des avocats de Beyrouth dépendront d’un équilibre établi entre références professionnelles, amitiés entretenues et donnes politiques incrustées sur un terrain éminemment public. Quatre avocats doivent être élus au conseil du barreau de Beyrouth, parmi lesquels sera choisi, au deuxième tour, le nouveau bâtonnier. Des onze candidats, quatre se présentent à ce poste, et c’est leur candidature qui polarise, de toute évidence, les stratégies des camps politiques. Alors que le 14 Mars a proclamé depuis septembre son appui à Nabil Toubiya, le 8 Mars oscille entre deux autres candidats, Antonio Hachem et Nohad Jabre. Le quatrième, Nabil Mchantaf, est indépendant, et distancié de la bataille politique. Les résultats des élections dépendront donc de la stratégie du 8 Mars. Pour mieux la cerner, quelques informations préalables s’imposent : sur les 6 390 avocats en appel qui doivent voter, environ 4 500 doivent faire état de présence demain dans la salle des Pas perdus. Parmi eux, plus de la moitié (60 %) seraient indépendants, selon des sources concordantes, alors que près de 40 % des avocats seraient politiquement engagés, également répartis entre 14 et 8 Mars. Cette répartition est doublée d’une marque confessionnelle, celle de la traditionnelle prédominance chrétienne au barreau de Beyrouth.

CPL et Hezbollah
Cette toile de fond, imprégnée cette année par l’indécision, sinon le départage du 8 Mars entre deux candidats, met en relief le rôle de la base aouniste dans la réussite des candidats non soutenus par le 14 Mars. Un rôle concrétisé, il y a plus d’une semaine, avec la visite que MM. Jabre et Hachem ont rendue au chef du Courant patriotique libre, Michel Aoun, à la demande des avocats aounistes, afin qu’il officialise son soutien à l’un ou l’autre candidat. C’est alors que M. Aoun avait décidé de convoquer lundi dernier en assemblée générale les comités de juristes au sein de son courant afin de trancher la question. Le vote s’est révélé favorable à Antonio Hachem, ôtant à Nohad Jabre l’appui qu’il escomptait. Candidat pour la quatrième fois au poste de bâtonnier, certains avocats lui reprochent « son hésitation », alors que d’autres estiment qu’il a perdu l’appui officiel du CPL « à cause de la pression du Hezbollah, qui soutient Antonio Hachem, faisant basculer en sa faveur l’appui initial du général Aoun à la candidature de M. Jabre ». L’information sur un pareil soutien court en effet depuis près de deux semaines, à la lumière des déclarations de certains avocats proches du parti chiite en faveur de M. Hachem. En contrepartie, les avocats qui soutiennent ce dernier invoquent « l’alliance de l’actuelle bâtonnière Amal Haddad et du chef du mouvement Amal Nabih Berry contre Michel Aoun, dans le cadre d’un règlement de comptes politiques ». Toutefois, en vertu du code de l’exercice de la profession, le conseil de l’ordre des avocats n’intervient pas dans les partis pris électoraux. « Le conseil veille au processus démocratique des élections, qui constituent un modèle pour le pays », explique un membre du conseil du barreau, rejetant fermement toute intervention du conseil dans les élections.

Indépendants, d’abord
Dans ce contexte d’infos et d’intox attisées par les tensions préélectorales, les deux candidats du 8 Mars demeurent attachés à leur image d’indépendants, certifiée par une non-affiliation partisane. « Je m’affiche en tant qu’indépendant et je le suis », affirme M. Hachem, qui s’était porté candidat en 2009 au poste de bâtonnier, récoltant « 1 400 voix sans aucun appui politique », selon des sources qui lui sont proches. De son côté, M. Jabre rappelle ses « 20 ans d’engagement au sein de l’ordre des avocats, qui l’amènent à se présenter aux élections sur une base purement professionnelle ».
Néanmoins, les deux candidats demeurent conscients de la nécessité des alliances politiques pour la victoire électorale. « Je suis soutenu par le mouvement Amal et le Parti syrien national social », confie M. Jabre, faisant part également de l’appui d’anciens bâtonniers en sa faveur. Il qualifie en outre sa relation avec le chef du CPL de « très satisfaisante, en dépit du choix des avocats aounistes ». De son côté, M. Hachem affirme entretenir des relations avec des personnalités politiques de tout bord. « Nous répondons à celui qui nous tend la main, sans pour autant être ligotés par son appui », affirme-t-il. Une opinion réitérée par Nabil Toubiya, fort de l’appui affiché du 14 Mars, qui « me soutient alors que je suis indépendant et que je me présente aux élections après une longue expérience, déjà élu à trois reprises au sein du conseil du barreau ».

Le quatrième siège
Si la situation de M. Toubiya semble plus stable que celle de ses rivaux, rien n’est encore joué. Ce sont les résultats du premier tour, à l’issue duquel seront élus les quatre nouveaux membres du conseil, qui devront élucider les stratégies des partis. Il est prévu que MM. Jabre, Hachem et Toubiya soient élus au conseil. Au deuxième tour, le 8 Mars devra soutenir celui qui a obtenu le plus grand nombre de voix, réduisant l’écart avec M. Toubiya, avec un espoir de le dépasser grâce aux voix des chrétiens indépendants. Le quatrième candidat qui probablement remportera le siège restant en tant que membre est Georges Nakhlé, précédemment élu au conseil en 2008. Dynamique, il se prévaut d’un « véritable souci pour l’indépendance et la dignité des avocats », qu’il traduit en « gardant ma porte ouverte pour toute assistance ». Seul candidat soutenu officiellement par le CPL, dont il est d’ailleurs membre, M. Nakhlé n’avait pas de réponse définitive hier quant au candidat qu’il soutiendrait au poste de bâtonnier.
Au sein des étroits couloirs électoraux, une dynamique semble prendre forme, à l’initiative d’avocats pourtant engagés. Ils invoquent « l’inviolabilité de la robe que nous revêtons ». Parmi ces avocats, Dory Sakr, qui conclut fermement : « Aucune partie, même celle que nous appuyons, n’a le droit de dicter son vote à un avocat. »
Les élections demain au conseil de l’ordre des avocats de Beyrouth dépendront d’un équilibre établi entre références professionnelles, amitiés entretenues et donnes politiques incrustées sur un terrain éminemment public. Quatre avocats doivent être élus au conseil du barreau de Beyrouth, parmi lesquels sera choisi, au deuxième tour, le nouveau bâtonnier. Des onze...

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