Rechercher
Rechercher

Actualités

Attentes légitimes

En droit anglais, il existe le principe des « legitimate expectations ». C’est un principe selon lequel, lorsque l’administration, en raison de son attitude (parfois juste un geste ou une déclaration), a laissé penser qu’elle suivra telle ou telle politique ou qu’elle prendrait telle décision, cette administration est tenue de satisfaire cette attente procédurale ou substantielle ou d’indemniser les victimes qui attendaient quelque chose. Le but est d’essayer d’appliquer un tel principe au Liban bien qu’il y ait une impossibilité technique. En effet, à quoi, actuellement, sommes-nous en droit de nous attendre ? Les tensions sont de plus en plus fortes, les initiatives de conciliation sont au point mort et nous spéculons sur une élection dont quasiment tout le monde connaît l’issue. Bref, nous jouons à nous torturer l’esprit pour arriver à un but non défini. Serait-ce le chaos ? Qu’il convienne d’attendre quelque chose de l’administration, tout le monde est d’accord sur ce principe, mais quel sera l’objet de notre attente ? Au moins, chez les Anglais, les personnes qui espèrent peuvent trouver un jour. À défaut, elles sont indemnisées. Ici, plus nous espérons, plus nos espoirs tarissent. Quant à être indemnisé de quelque chose, il serait encore plus vain de l’espérer. Récemment, un professeur français est venu donner une conférence à l’Université Saint-Joseph. À la question de savoir si l’État libanais pouvait sortir de la crise suite aux diverses résolutions de l’ONU – sur lesquelles portait la conférence – il a apporté, avec beaucoup de franchise, ce qui surprit mais amusa en même temps l’assistance, une réponse dans laquelle, mettant le doigt sur la plaie, il a estimé que pour parler d’État libanais, il fallait d’abord qu’il y eut un État. Un État se définit par ses institutions et ses pouvoirs. Or, ce que ce professeur a reconnu et qui est clair, c’est que chez nous, la première grande lacune est que nous ne savons pas qui gouverne : le président ou le Conseil des ministres ? Donc, face à un État pareil, qu’est-ce que le citoyen est en droit d’attendre ? Les décrets de base ne sont pas signés et il y a un blocage total des institutions. Dire au peuple de bouger relève de l’incongru car bouger pour qui ou encore pourquoi ? Si nous devions appliquer ce principe de droit anglais chez nous, que d’attentes devraient être indemnisées ! Comme le Conseil d’État aurait été en surcharge de dossiers ! Pour le moment, au lieu d’attentes légitimes au niveau purement juridique, nous sommes dans des spéculations électorales, tout aussi légitimes d’ailleurs bien qu’elles représentent beaucoup de bruit pour rien. Une fois de plus, ce à quoi nous aspirons, c’est juste un retour à la normale, indépendamment de ce que pourrait penser tel ou tel autre leader. Or la reconstruction d’un État passe par une entente entre les citoyens, lesquels devraient avoir une pensée saine et pure, imperméable à tout lavage de cerveau frisant le ridicule et à tout avilissement moral face à des idées qui amènent le pays à plonger dans un chaos encore plus profond. Jean-Paul MOUBARAK Juriste
En droit anglais, il existe le principe des « legitimate expectations ». C’est un principe selon lequel, lorsque l’administration, en raison de son attitude (parfois juste un geste ou une déclaration), a laissé penser qu’elle suivra telle ou telle politique ou qu’elle prendrait telle décision, cette administration est tenue de satisfaire cette attente procédurale ou substantielle ou...