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Aimer son pays...

Aimer son pays, c’est quoi au juste ? Combien de fois ai-je entendu dire par certaines de mes connaissances qu’elles étaient patriotes et qu’elles aiment leur pays comme un morceau de leur chair ? Ironie du sort, ces nationalistes passionnés sont souvent à quelques dizaines de milliers de kilomètres de leur cher et bien-aimé pays. Aimer prend alors une toute autre dimension. Autrement dit, je l’aime tant que je suis loin et que je me vois dans l’impuissance de faire quoique ce soit pour son évolution. Quelle lâcheté ! Mais ne jouons pas les moralistes en ignorant les circonstances des uns et des autres, et n’oublions pas qu’il est bien facile de critiquer les gens quand nous-mêmes sommes dans ce pays et que nous luttons vaillamment pour qu’il se maintienne en vie. Lutter, pour moi, ne signifie pas s’insurger en allant faire des sit-in ou des manifestations contre tel ou tel homme politique. Une lutte, c’est avant tout une aventure de l’esprit et de la conscience, une lutte pour la vie d’un pays peut s’exprimer d’une façon banale en allant à son boulot malgré les crises et les bombardements et les personnes qui bloquent le maintien des institutions. Montesquieu affirmait : « Si je savais une chose utile à ma nation qui fut ruineuse à une autre, je ne la proposerais pas à mon prince, parce que je suis homme avant d’être français », ou bien : « Parce que je suis nécessairement homme, et que je ne suis français que par hasard. » Cette petite phrase est plus que jamais d’actualité. Au Liban, il ne faut jamais oublier que nous sommes des hommes avant d’être de tel ou tel parti politique ou de telle confession qui, elle, n’est que le fruit du hasard et de la destinée. Nous sommes hommes et nous devons penser avec notre humanité au lieu de nourrir les haines et les calomnies. Il faut savoir être utile à sa nation et non s’occuper à la détruire sur l’injonction de nations qui n’ont le qualificatif de fraternel que par un malheureux concours de circonstances, des nations qui proposent leur aide dans des buts pas si désintéressés que ça. C’est face à de telles réalités que Voltaire s’est permis de dire : « Telle est donc la condition humaine, que souhaiter la grandeur de son pays c’est souhaiter du mal à ses voisins » même si c’est sous des airs innocents... Nous ne sommes pas là pour juger quiconque, mais pour constater des faits. Aimer son pays, ce n’est pas aimer une fraction de la population, ce n’est pas aimer les hommes et femmes de telle ou telle confession, ce n’est pas aimer un parti politique, c’est aimer un tout global et uni. Il ne faut pas regarder le Liban comme source de l’individualisme. Chaque Libanais devrait être présent pour son frère libanais, pour le bonheur de l’autre Libanais, où et quel qu’il soit. Ce qui doit intéresser les leaders libanais, ce n’est pas le bonheur de tous les Libanais, mais de chacun pris individuellement. Il ne faut pas dire : « Je dispose d’une majorité », mais plutôt avoir en vue la conscience de chacun, la façon de penser, de réaliser et d’examiner les événements pour trouver des compromis, loin des intérêts individuels qui font la joie des autres et sèment la zizanie à l’intérieur d’une nation connue et reconnue comme étant une mosaïque de civilisations. Chaque Libanais doit se considérer un symbole pour le Liban et doit être fier de parler en son nom. Ne jamais oublier de se voir en tant que Libanais avant d’être autre chose. Le Liban à l’étranger n’est pas seulement une représentation diplomatique, mais aussi une perception de son peuple vue par ceux qui ne nous connaissent pas. Aimer le Liban, c’est y vivre, c’est se côtoyer, se comprendre, parler d’égal à égal. Je refuse de croire qu’en disant cela je suis mû par un idéalisme enfantin. Car je sais que tous les Libanais pensent comme moi, mais refusent de faire un pas car ils ont peur. De quoi ? De qui ? Personne ne perdra son aura. Personne ne perdra son prestige. Pour aimer son pays, il faut commencer par le peuple. Or si le peuple s’entre-tue pour des causes qui ne vont peut-être rien lui apporter, comment définir alors l’amour d’un pays ? L’amour du pays passe par l’unité, par un esprit raisonnable, par une volonté de survie. Cette volonté ne se caractérise pas par des mots, mais par des actes simples qui montrent que nous sommes là pour faire vivre le Liban. Or ce qui se passe actuellement mènera à une hécatombe. Libanais, prenez conscience de vos responsabilités. Vous méritez bien mieux que des crises politiques et des tensions confessionnelles. Vous êtes le Liban. Et c’est vous qui devez le faire (re)vivre, de n’importe quelle façon ; c’est à vous de penser à un avenir meilleur qui passe par votre jugement et votre entendement, en ne tenant nul compte des avis d’hommes politiques grisés par la tentation du pouvoir. Jean-Paul MOUBARAK Juriste

Aimer son pays, c’est quoi au juste ? Combien de fois ai-je entendu dire par certaines de mes connaissances qu’elles étaient patriotes et qu’elles aiment leur pays comme un morceau de leur chair ? Ironie du sort, ces nationalistes passionnés sont souvent à quelques dizaines de milliers de kilomètres de leur cher et bien-aimé pays. Aimer prend alors une toute autre dimension....