L’ancien gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé. Joseph Eid/Archives AFP
C’est sans issue que reste le recours porté en août dernier par la chef du Contentieux de l’État, Hélène Iskandar, contre une décision de l’ancien premier juge d’instruction de Beyrouth, Charbel Abou Samra, de ne pas fixer de nouvelle audience à l’ex-gouverneur de la Banque du Liban (BDL) Riad Salamé, après l’avoir interrogé le 2 août 2023 dans le dossier de l’enquête pour soupçons de corruption au Liban, le laissant ainsi implicitement libre.
Une énième chambre d’accusation, chargée le 24 juin par le premier juge d’instruction de Beyrouth dans cette affaire, Ayman Oueidate, de se pencher sur la question, a ainsi été ciblée le lendemain par une action en responsabilité de l’État intentée par M. Salamé. La présidente de la chambre, Zalfa el-Hassan, et ses assesseurs ne pourront donc pas examiner le recours de Mme Iskandar, la loi édictant que des magistrats visés par une action en responsabilité ne peuvent l’étudier dès lors qu’elle a été déposée au greffe de l’assemblée plénière de la Cour de cassation, compétente en la matière.
Or l’assemblée plénière ne peut siéger, ayant perdu son quorum en janvier 2022, sur fond de divergences politiques quant à de nouvelles nominations judicaires après des départs à la retraite de membres de l’assemblée. Sauf qu’une jurisprudence récente a voulu surmonter cet obstacle en jugeant que seule une notification des magistrats ciblés par une telle action peut leur ôter la mainmise sur les dossiers dont ils sont en charge. Cette jurisprudence estime aussi que tant qu’aucune décision n’a été prise par ces magistrats, l’action qui les vise n’est pas valable. Ce qui est le cas pour la chambre présidée par Zalfa el-Hassan, qui n’a été ni notifiée ni n’a pris de décision dans l’affaire.
Sixième tentative
La chambre présidée par Zalfa el-Hassan a été choisie par le juge Oueidate après qu’une action en responsabilité a visé il y a moins d’un mois la chambre présidée par la juge Randa Harrouk. Le magistrat Oueidate avait nommé cette dernière instance après que la chambre présidée par le juge Habib Mezher s’est désistée de la même mission qui lui avait été confiée.
En août 2023, l’ex-gouverneur de la BDL avait également intenté une action en responsabilité contre la chambre présidée par Maher Cheaïto, qui venait d’être désignée. Celle-ci avait succédé à la chambre présidée par Sami Soudki, qui avait subi le même sort, après avoir succédé à la chambre présidée par Mireille Mallak, qui avait été la première à se voir confier le recours de Mme Iskandar et ensuite à être visée par la même action en responsabilité de l’État.
Si Riad Salamé n'était pas protégé et même soutenu par les plus hautes instances de l'État et de la Magistrature à qui il a rendu d'énormes "services", il n'aurait pas pu continuer à jongler entre toutes les poursuites auxquelles il fait face depuis des années et dans de nombreux pays et malgré une fiche rouge d'Interpol. Cette affaire est devenue une véritable mascarade qui constitue une tâche indélébile sur la Justice libanaise devenue la risée du monde entier.
04 h 35, le 03 juillet 2024