Le destroyer lance-missiles de classe Arleigh Burke de la marine américaine USS Gravely naviguant en formation avec le FS Forbin dans la mer Rouge, le 7 juin 2024, dans le cadre de leur mission visant à soutenir la stabilité et la sécurité maritimes dans la région du Moyen-Orient. Photo US Navy/AFP
Les renseignements américains ont estimé que le risque d’une offensive israélienne de grande ampleur au Liban pourrait renforcer l’alliance entre la Russie et « l’axe de la résistance » pro-iranien dans la région, notamment la coopération militaire entre Téhéran et Moscou, selon des informations du site Middle East Eye (MEE).
Le 29 juin, l’Iran a averti Israël que tous les membres de « l’axe de la résistance » pourraient se mobiliser si le Hezbollah subissait au Liban une offensive israélienne de grande ampleur. La mission iranienne auprès de l’ONU à New York avait ensuite indiqué, dans un message posté sur X le même jour, que le pays considérait « la propagande du régime sioniste concernant son intention d’attaquer le Liban » comme faisant partie de « la guerre psychologique » et avait averti Tel-Aviv que « tous les membres de l’axe de la résistance », qui comprend l’Iran et ses alliés régionaux, pourraient se mobiliser s’il lançait une offensive « à grande échelle » contre le Hezbollah au Liban.
Le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, avait affirmé le 27 juin, après une visite à Washington, qu’Israël ne voulait pas entrer en conflit armé avec le Hezbollah sur le territoire libanais, mais que si cela devait arriver, l’armée israélienne avait « la capacité de ramener le Liban à l’âge de pierre ».
Relations militaires entre l’Iran et la Russie
William Usher, un cadre haut placé de la CIA spécialisé dans le Moyen-Orient, a déclaré à Middle East Eye que « si Israël attaque l’intérieur du Liban, cela entraînerait probablement un renforcement des relations militaires entre l’Iran et la Russie pour aider le Hezbollah à se défendre ».
Patrick Theros, ancien ambassadeur des États-Unis au Qatar, a estimé auprès de MEE que si les États-Unis soutiennent une attaque israélienne contre le Hezbollah, comme ils l’ont signalé, cela pourrait entraîner l’intervention de la Russie. M. Theros affirme également que si Israël attaque le Hezbollah, ce serait une erreur, et que si les États-Unis soutiennent cette attaque, la Russie interviendra. Il réaffirme aussi que les Russes pourraient approvisionner les rebelles yéménites houthis par l’intermédiaire des Iraniens de manière clandestine ou fournir davantage de renseignements. Ce soutien à la « résistance » pourrait notamment se matérialiser par l’envoi de missiles anti-navires aux houthis, envisagé par le président russe Vladimir Poutine, poursuit MEE.
Pour Fabian Hinz, expert en balistique à l’Institut international des études stratégiques contacté par MEE, l’offre et la demande entre la Russie et les houthis « correspondent ». Les houthis, qui attaquent des navires de commerce en mer Rouge depuis novembre 2023 en soutien à Gaza, utilisent généralement des drones et des missiles balistiques pour attaquer les navires internationaux. Leur arsenal de missiles comprend jusqu’à présent des modèles de production iranienne et la Russie pourrait leur fournir, selon M. Hinz, le missile antinavire supersonique « KH-31 ». Dans ce cadre, une réunion avait eu lieu en janvier au Kremlin, entre le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Mikhail Bogdanov, et une délégation houthie.
La Russie est alliée à l’Iran, ennemi des États-Unis depuis l’avènement de la République islamique en 1979. Elle est également proche du Hezbollah, avec qui elle combat en Syrie aux côtés du régime du président Bachar el-Assad. Selon un article du Wall Street Journal datant de novembre 2023, les mercenaires paramilitaires russes de Wagner envisageaient de fournir des systèmes de défense antiaérienne au Hezbollah.
Ce soutien russe aux houthis est également perçu par un commandant à la retraite du CentCom, le général Frank McKenzie, interrogé par MEE, comme une « revanche » contre les intérêts américains en mer Rouge, face à ce que Moscou perçoit comme une responsabilité des États-Unis dans des attaques ukrainiennes contre des navires russes en mer Noire.
Selon certains experts, la Russie considère la guerre au Moyen-Orient comme une opportunité pour imposer d’autres défis au gouvernement américain de Joe Biden en raison de son soutien à l’Ukraine. La Russie compte également sur les États du Golfe, riches en hydrocarbures, pour démontrer qu’elle n’est pas isolée sur la scène internationale, notamment avec une forte alliance russo-saoudienne et le soutien de l’entrée de l’Arabie saoudite dans les Brics. L’alliance russo-saoudienne s’intensifie avec le partenariat énergétique OPEP+. Toutefois, les liens entre la Russie et l’Iran font partie des points de friction entre Riyad et Moscou.
Juste retour du baton ! Pourquoi les russes se generaient ?
21 h 03, le 02 juillet 2024