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Monde - Repère

Les leçons du premier tour des législatives françaises

Le Rassemblement national impose sa présence avec un score historique lors d’un scrutin où les électeurs se sont fortement mobilisés.

Les leçons du premier tour des législatives françaises

Des manifestants se sont rassemblés sur la place de la République à Paris dimanche 30 juin au soir pour protester contre l'extrême-droite, arrivée en tête du premier tour des législatives. Dimitar Dilkoff/AFP

La République a tremblé. Dimanche 30 juin, le Rassemblement national (RN) a battu son propre record en atteignant le score historique de 33,5% des voix lors du premier tour des législatives françaises anticipées, selon les estimations du soir du vote. C’est la première fois que la formation d’extrême droite cofondée par Jean-Marie Le Pen arrive en tête d’un scrutin national, qui a en outre vu un taux de participation inégalé depuis la fin des années 1990. Le parti arrive ainsi devant le Nouveau front populaire (NFP) qui rassemble les gauches à 28% et l’ancienne majorité présidentielle d’Emmanuel Macron qui récolte 20% des votes. De nombreuses inconnues planent néanmoins encore sur l’issue du second tour prévu dimanche 7 juillet, et ainsi, sur la composition finale de l’Assemblée nationale et du gouvernement qui en résultera. Quelques leçons se dessinent déjà après ce premier tour.

Participation record depuis 1997

En annonçant la dissolution de l’Assemblée nationale après son lourd revers aux européennes le 9 juin, le président Emmanuel Macron entendait redonner aux Français « le choix de notre avenir parlementaire » dans un « acte de confiance en la capacité du peuple français à faire le choix le plus juste pour lui-même et pour les générations futures ». Avec 65,5% de participation, un record depuis 1997 lorsque 67,9% des électeurs s’étaient mobilisés au premier tour des élections législatives, la légitimité des résultats est difficilement contestable. Près de 12 millions d’électeurs ont ainsi glissé dans l’urne un bulletin du parti Rassemblement National (RN) d’extrême droite, selon les estimations de dimanche soir, sur les près de 50 millions d’inscrits sur les listes électorales.

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Confirmation de la percée du RN

Si le président de la République avait parié sur un resserrement du barrage républicain autour de son camp, son parti Renaissance et ses alliés arrivent en troisième position à près de 20% des voix, loin derrière le RN mené par Jordan Bardella, arrivé en tête avec plus de 33% des votes et déjà plusieurs dizaines de candidats élus au premier tour. Un score qui confirme et augmente celui de plus de 31% obtenu aux élections européennes le 9 juin, alors que le RN semble avoir bénéficié de son alliance avec le président des Républicains (LR) Eric Ciotti - contre l’avis d’une majorité des cadres du parti de droite - et d’un report de voix d’une partie des électeurs de Reconquête !, la formation d’extrême droite d’Eric Zemmour qui avait pourtant refusé de s’allier au parti lepéniste. Selon les premières estimations, qui ne prennent pas encore en compte les désistements potentiels en cas de triangulaires ou les consignes de vote possibles, le RN remporterait à l’heure actuelle 230 à 280 sièges au parlement, sous la barre de la majorité absolue de 289 députés. Reste que dans l’Assemblée dissoute, la formation ne disposait que de 89 élus.

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Le Nouveau front populaire fait mieux que la Nupes

Malgré les dissensions qui existaient entre eux lors de la campagne électorale pour les européennes, les partis de gauche et les écologistes ont réussi à former une alliance législative - parfois bancale - pour faire face à la montée du RN. En dépit de l’effet repoussoir de la figure de Jean-Luc Mélenchon, le Nouveau front populaire (NFP) semble avoir réussi à rallier des déçus du macronisme comme des abstentionnistes. Lors du dernier scrutin législatif en 2022, la précédente alliance de gauche, la Nupes menée alors par le leader de La France Insoumise (LFI) - mis cette fois à la marge -, avait obtenu près de 25% des votes, juste derrière la majorité présidentielle. Désormais, l’union de gauche est la deuxième force politique du pays. Si l’alliance tiendra jusqu’au second tour du 7 juillet, il n’est pas certain qu’elle subsiste ensuite face à l’éventuelle formation d’une coalition avec le camp présidentiel pour éviter un gouvernement RN avec Jordan Bardella comme Premier ministre.

Nombre record de triangulaires

Avec la forte participation enregistrée lors de ce scrutin et la fragmentation de la scène politique en trois blocs durant la campagne qui a suivi la dissolution de l’Assemblée nationale, le premier tour des législatives a vu un nombre record de triangulaires se former. Malgré le record de 76 élus dès le premier tour, 305 circonscriptions ont vu passer trois candidats au second tour, soit près de 53% des sièges disputés, alors que l’Assemblée nationale compte 577 élus. Généralement, en raison de la dispersion du vote, les triangulaires confirment la place du parti arrivé en tête. L’union des gauches a tout de suite appelé ses candidats à se désister dans des triangulaires où ils seraient arrivés en troisième position contre un adversaire RN. Si le président Emmanuel Macron a immédiatement déclaré à l’AFP vouloir un « large rassemblement démocrate et républicain », c’est son Premier ministre sortant Gabriel Attal qui a ensuite tenté de clarifier la stratégie pour le second tour : « pas une voix ne doit aller au RN ». La position de la majorité présidentielle penchait ces dernières semaines pour un scénario ni RN-ni LFI. Et le camp dit centriste reste divisé sur la question, le président du parti Horizons Edouard Philippe ayant notamment mis sur le même plan les candidats RN et LFI. Parmi les tenants de cette ligne se trouvent également de nombreux représentants dissidents du parti LR. Une rupture avec une tradition de la droite classique appelant au front républicain en cas de danger RN.

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Une autre majorité est-elle possible ?

Le doute règne : le RN obtiendra-t-il la majorité absolue au Parlement à l’issue du second tour ? Si le parti pourrait certes conserver une majorité relative à l’Assemblée nationale, Jordan Bardella avait prévenu qu’il ne gouvernerait pas dans ces conditions tout en cohabitant avec Emmanuel Macron. La formation d’extrême droite pourrait essayer de rallier d’autres élus de la droite républicaine en plus de ceux qui ont suivi Eric Ciotti, aucune autre formation ne semblant prête à se compromettre avec le RN. Mais le pari est incertain au vu de la fronde interne contre Eric Ciotti. Dans le cas où une majorité alliée à l’extrême droite ne serait pas possible, certains partis centristes du NFP pourraient avaler la couleuvre d’une coalition avec le camp présidentiel - malgré le discrédit que cela jetterait sur eux et le risque inhérent qui en découlerait pour leur avenir politique. Cela ferait néanmoins sauter l’union de la gauche, alors qu’une partie de ses composants refuseraient cette alliance et ne seraient en outre pas acceptés par le groupe de Renaissance et de ses alliés. Certes, contrairement au scrutin législatif précédent, où les candidats LFI représentaient près de la moitié des représentants de la Nupes, ils sont désormais en minorité. Mais ils pourraient former un groupe conséquent au Parlement et indispensable pour obtenir une majorité absolue. À moins que la droite traditionnelle puisse sortir son épingle du jeu au second tour et se targuer de compenser le rejet d’une gauche radicale dans une coalition gouvernementale. L’absence en France de culture du compromis et du consensus politiques pourrait en réalité conduire à la présence de trois blocs irréconciliables dans une Assemblée nationale ingouvernable, face à un gouvernement de technocrates impuissant.

La République a tremblé. Dimanche 30 juin, le Rassemblement national (RN) a battu son propre record en atteignant le score historique de 33,5% des voix lors du premier tour des législatives françaises anticipées, selon les estimations du soir du vote. C’est la première fois que la formation d’extrême droite cofondée par Jean-Marie Le Pen arrive en tête d’un scrutin national, qui a...
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Aura-t-on la même couverture médiatique lors des législatives libanaises?…

Gros Gnon

14 h 38, le 01 juillet 2024

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Commentaires (1)

  • Aura-t-on la même couverture médiatique lors des législatives libanaises?…

    Gros Gnon

    14 h 38, le 01 juillet 2024

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