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La Cour suprême américaine réduit les pouvoirs de régulation des agences fédérales


La Cour suprême des Etats-Unis à Washington, le 27 juin 2024. Photo Reuters/Nathan Howard/File Photo

La Cour suprême américaine à majorité conservatrice a réduit vendredi la liberté d'action des agences fédérales, revenant sur une jurisprudence de 40 ans, une décision saluée par les parlementaires républicains comme « le début de la fin de la bureaucratie ».

Cette jurisprudence, dite « doctrine Chevron », donnait le dernier mot aux agences gouvernementales dans leur champ de compétence, par exemple en matière d'environnement, de protection sociale ou des consommateurs. Elle imposait aux tribunaux fédéraux de suivre l'interprétation « raisonnable » de ces agences en cas d'ambiguïté ou de silence de la loi.

« Les tribunaux doivent exercer leur jugement indépendant pour décider si une agence a agi conformément à l'autorité que lui confère la loi et ne peuvent pas s'en remettre à l'interprétation de la loi de cette agence, simplement parce qu'elle est ambiguë », écrit au nom de la majorité des six conservateurs contre les trois progressistes le président de la Cour, John Roberts.

« Chevron est annulé », poursuit-il.

« Hubris judiciaire » 

La jurisprudence Chevron « est devenue un pilier du gouvernement moderne, soutenant les efforts de régulation de toutes sortes - pour en citer quelques-uns sur la pureté de l'air et de l'eau, la sécurité des aliments et des médicaments et l'honnêteté des marchés financiers », objecte la juge progressiste Elena Kagan dans son avis de désaccord.

Elle regrette qu'avec cet arrêt « une décision d'hubris judiciaire supplante une décision d'humilité judiciaire », puisqu'il reviendra désormais aux tribunaux de se prononcer sur une myriade de sujets pour lesquels, contrairement aux agences fédérales, ils ne disposent d'aucune expertise particulière.

« Le Congrès sait qu'il ne rédige pas - en fait ne peut pas - rédiger des lois parfaitement exhaustives », souligne la juge Kagan, reprochant à la majorité d'avoir lors de cette session « décidé de limiter les pouvoirs des agences, malgré les indications du Congrès dans le sens contraire ».

Elle faisait notamment référence à une décision de la Cour jeudi, par la même majorité des six conservateurs contre les trois progressistes, déniant au gendarme américain des marchés financiers, la SEC, le pouvoir de sanctionner individus ou sociétés via ses propres juges administratifs plutôt que de passer par la justice civile ordinaire.

« Réglementations pesantes » 

Les détracteurs de la jurisprudence Chevron arguaient que l'interprétation des lois relève du pouvoir judiciaire et non des agences fédérales, dépendant du pouvoir exécutif.

Les trois principaux dirigeants républicains à la Chambre des représentants, dont le président de celle-ci, Mike Johnson, se sont félicités dans un communiqué conjoint d'une décision qui « représente le début de la fin de la bureaucratie », imputant à la jurisprudence Chevron « beaucoup des réglementations pesantes qui étouffent le progrès et empiètent sur les libertés ».

Le chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, a lui déploré que la Cour suprême à majorité conservatrice « se soit une fois de plus rangée du côté des puissants intérêts particuliers et des corporations géantes contre la classe moyenne et les familles américaines ».

Plusieurs ONG de défense de l'environnement ont également dénoncé la décision, comme Evergreen Action.

« Le démantèlement de la doctrine Chevron donne à tous les juges nommés sous Trump le pouvoir de passer outre l'interprétation de la loi des experts des agences et d'y substituer leur parti pris idéologique », affirme l'association dans un communiqué.

« Un revirement de la jurisprudence Chevron serait un choc injustifié pour le système juridique », avait plaidé lors des débats en janvier la conseillère juridique de l'administration du président démocrate Joe Biden, Elizabeth Prelogar, soulignant les risques d'instabilité qu'elle provoquerait. Elle prédisait dans cette hypothèse, une cacophonie juridique, avec « des règles différentes dans différents endroits du pays ».

Mais la plupart des juges conservateurs ont paru rétifs à ces arguments.

Paradoxalement, lorsqu'elle a été adoptée en 1984, cette décision représentait un succès pour l'administration du président républicain Ronald Reagan qui accusait des juges progressistes d'ensevelir les entreprises sous des régulations exorbitantes.

La Cour suprême américaine à majorité conservatrice a réduit vendredi la liberté d'action des agences fédérales, revenant sur une jurisprudence de 40 ans, une décision saluée par les parlementaires républicains comme « le début de la fin de la bureaucratie ».Cette jurisprudence, dite « doctrine Chevron », donnait le dernier mot aux agences gouvernementales dans...