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Lifestyle - Inauguration

Doyenne de l'art abstrait dans le monde arabe, Saloua Raouda Choucair a désormais son musée

L’œuvre importante et fascinante qu’a laissée derrière elle cette pionnière et artiste remarquable prend enfin place dans un musée.

Doyenne de l'art abstrait dans le monde arabe, Saloua Raouda Choucair a désormais son musée

Le musée de Saloua Raouda Choucair à Ras el-Metn. Photo Ieva Saudargaité/Saloua Raouda Choucair Foundation

Pour marquer le 108e anniversaire de la naissance de Saloua Raouda Choucair ( 24 juin 1916-26 janvier 2017), Hala Choucair Gharzeddine, sa fille unique, lui dédie un musée. L’établissement a ouvert ses portes lundi 24 juin à Ras el-Metn, dans le caza de Baabda, à 28 kilomètres de Beyrouth, offrant aux visiteurs une plongée dans l'univers de cette pionnière de l'art abstrait au Moyen-Orient, qui occupe à juste titre la position de figure importante de l'histoire de l'art du XXe siècle.

Installé au sein d’une forêt de pins et d'autres espèces d’arbres, le bâtiment de 645 m2 a été conçu par l’architecte Karim Begdache. « La structure en béton armé est surélevée sur pilotis pour éviter d’excaver le sol et pour préserver le site », explique l’architecte, soulignant que les façades sont en enduit de ciment blanc bouchardé et que sa toiture végétalisée s'insère parfaitement dans le décor. « Bien qu'elle soit née et ait grandi à Beyrouth, ma mère a toujours été enchantée par les forêts de pins », a déclaré Hala Choucair. « Et lorsqu'elle a découvert ce terrain où nous nous trouvons aujourd'hui, elle a été très inspirée par ses arbres, ses plantes et ses rochers, et elle en a immédiatement produit le plan. Nous voici donc, bien des années plus tard, en train d'inaugurer sur le même lieu un musée qui permettra aux générations futures de découvrir l’art de ma mère. »

Niché au sein d’une forêt de pins, le bâtiment de 645 m2 a été conçu par l’architecte Karim Begdache. Photo Ieva Saudargaité/Saloua Raouda Choucair Foundation

Premier artiste arabe à la Tate Modern

Le musée abrite les outillages et matériaux de l’atelier de l’artiste, les meubles d’appui de sa chambre, les textiles et les bijoux qu’elle a exécutés, ses archives qui fournissent des informations inestimables sur le processus de pensée de l'artiste, son développement artistique et les contextes culturels et historiques qui ont influencé son œuvre. On y découvre également de petites maquettes d’études qui montrent une très grande richesse d’invention, et plus de cinq cents œuvres, peintures abstraites ou figuratives comme l’Autoportrait 1943. Et aussi et surtout des sculptures, en bois, métal, pierre et fibre de verre, qui débordent des murs du musée pour s’exposer en plein air au sein d’un jardin. Les plus célèbres sont celles constituées de pièces imbriquées qui peuvent être démontées et réorganisées, comme dans un poème soufi. L’ensemble, réalisé sur une période de six décennies, compose une œuvre à l’écart, qui ne peut être comparée à aucune autre.

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Pourtant, cette artiste prolifique avec une œuvre d'une ampleur et d'une profondeur étonnantes, est restée largement méconnue en dehors d'un cercle d'amateurs d'art. Bien tardivement, l'Université américaine de Beyrouth (AUB), le musée Sursock, et la Lebanese American University (LAU) ont rendu hommage à celle que Joseph Tarrab, notre ancien collègue et critique d’art, avait surnommé « L’oiseau rare de haute volée ».

Un avis partagé par la Tate Modern à Londres, puisque ce musée regroupant la collection nationale d'art moderne et d'art contemporain international lui avait consacré une exposition au long cours en 2013. Cette manifestation marquait la première exposition personnelle à la Tate pour un artiste arabe. « Saloua Raouda Choucair, une figure singulière qui mérite sa place sous les projecteurs », avait alors écrit Ben Luke, rédacteur en chef de The Art Newspaper, et membre du conseil consultatif de la Government Art Collection. Ce fut également un grand succès auprès du public.

Nombre de ses œuvres ont été acquises par des musées, notamment par le Metropolitan Museum of Art de New York, et le Museum of Modern Art History (MoMA), le musée d'art moderne et contemporain du Qatar (Mathaf), et le Centre Pompidou. Ce dernier avait dédié une salle entière à l’œuvre de Saloua Raouda Choucair lors d'une exposition organisée en 2021 intitulée « Elles font l’abstraction », à laquelle une centaine d’artistes dont des Libanaises (Etel Adnan, Huguette Caland, Helen Khal). 

Vivre pour peindre et sculpter

Saloua Raouda Choucair a étudié successivement à l'école Ahlia, puis à l'école laïque française, et enfin à l'American Junior College for Women (actuellement la LAU), où elle s'était concentrée sur les sciences et les mathématiques qui ont profondément influencé son art.

Une œuvre importante qui a enfin trouvé sa place. Photo Ieva Saudargaité/Saloua Raouda Choucair Foundation

Deux étapes de sa vie vont l’amener à combiner dans ses œuvres des éléments de l’abstraction occidentale avec l’esthétique islamique.

En 1943, un voyage en Égypte éveille sa passion pour l'art et l'architecture islamiques. En 1948, elle voyage à Paris, avec l'intention d'y rester seulement quelques mois. Elle y demeurera plus de trois ans, étudiera à l'École des beaux-arts la sculpture, la lithographie et les techniques de la fresque et côtoiera des artistes de l’avant-garde comme Fernand Léger et Vasarely. Mais c'est l’Atelier de l’art abstrait qui l’attire comme un aimant. Aux côtés d’Edgard Pillet, l'un des premiers promoteurs de l’abstraction géométrique, et de Jean Dewasne, considéré comme l'un des maîtres de l'abstraction constructive, Saloua Raouda Choucair s'imprègne des thèmes, des tendances et philosophies du modernisme européen, et participe au Salon des réalités nouvelles en 1951 (Salon de l'abstraction). « Ce furent des années fantastiques pour moi », avait-elle confié. Dès lors, sous son aspect structural, architectural, géométrique et combinatoire pur, l’œuvre révèle l’intérêt de l’artiste pour la science, les mathématiques, la musique, l'art et la poésie islamiques.

Le musée est ouvert aux chercheurs, collectionneurs, étudiants, amateurs, sur rendez-vous. Tél. +961 71 583 904

www.salouaraoudachoucair.com

Instagram : @salouaraoudachoucair

Pour marquer le 108e anniversaire de la naissance de Saloua Raouda Choucair ( 24 juin 1916-26 janvier 2017), Hala Choucair Gharzeddine, sa fille unique, lui dédie un musée. L’établissement a ouvert ses portes lundi 24 juin à Ras el-Metn, dans le caza de Baabda, à 28 kilomètres de Beyrouth, offrant aux visiteurs une plongée dans l'univers de cette pionnière de l'art abstrait au...
commentaires (2)

Excellente initiative, bravo Hala

Daouk Andree

12 h 55, le 25 juin 2024

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Commentaires (2)

  • Excellente initiative, bravo Hala

    Daouk Andree

    12 h 55, le 25 juin 2024

  • Bravo Hala

    Daouk Andree

    12 h 53, le 25 juin 2024

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