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Culture - Exposition

À Paris, lever de voile sur l'art émergent émirati

Pour la première fois dans l'histoire du Salon des beaux arts français, un espace dédié à des artistes du Moyen Orient. 

À Paris, lever de voile sur l'art émergent émirati

L’Orangerie du Sénat dans les préparatifs du Salon. Photo Yannis Muaka Nunes

À l’occasion des 160 ans de la Société nationale des beaux arts, l’institution revient au lieu symbolique qui l’a vu naître, dans le Jardin du Luxembourg, à Paris. Cet espace originellement voué à la culture de plantes rares a conservé son air exotique pour accueillir des artistes du monde entier ; et pour la première fois, une délégation arabe venant des Émirats arabes unis.

Quelques coups de marteaux se font entendre mardi dernier, J-2 avant le vernissage, dans une grande salle à l’odeur de peinture fraîche. C’est une monumentale orchestration dont l’achèvement patiente, sous les doigts de petites mains dispersées dans l’Orangerie. Les œuvres émiraties sont déjà suspendues, elles n’attendent que le public, au milieu d’un espace à la scénographie captivante.

La continuité d’une tradition d’ouverture au monde et aux autres

Selon la directrice exécutive du Salon, Isabelle Lawson, l’esprit du Salon « c’est l’héritage de l’artiste Théophile Gautier, qui a permis d'exposer pour la première fois dans un Salon français des artistes femmes et des artistes venant de l’étranger ». Ce geste audacieux et précurseur pour le XXe siècle naissant incarne toujours la ligne dans laquelle il s’inscrit, en travaillant pour la première fois avec une délégation du Moyen-Orient.

En effet, le projet est né en novembre dernier de la rencontre de plusieurs acteurs du milieu, mais également de l’initiative de l’ambassade émiratie pour former une délégation spécialisée. Y figurent la directrice exécutive du Salon et Chloé Chidiac de Missolz, cocommissaire de la délégation et fondatrice de la galerie Salahin, dont l’objectif est de donner à voir le travail d’artistes du Moyen-Orient peu connus en France. Leurs lignes de travail qui s’articulent autour de valeurs communes ont concordé vers la création d’un espace qui, pour la première fois dans l’histoire du Salon, est dédié aux artistes de cette région.

De gauche à droite : Chloé Chidiac de Missolz, fondatrice de Salahin et co-commissaire de la délégation émiratie pour l’exposition, Isabelle Lawson, directrice exécutive du Salon national des beaux arts, et Lo Kee, photographe et président de la section. Photo Yannis Muaka Nunes

Le corner émirati à l’honneur

Cette coopération d’acteurs a également engagé le président de la section photographie du Salon des beaux arts, Lo Kee, pour la sélection des artistes. Leur choix s’est focalisé sur trois femmes et deux hommes qui portaient un message susceptible de parler à tous : Jalal Bin Thaneya, Faisal Alrais, Karima al-Shomely, Ola Allouz, Fatima Albuldoor.

Les cinq artistes proposent un regard singulier sur la thématique des espaces cachés. Cette coloration qui unit les œuvres dans le message n’était pas pensée au départ, explique Chloé, elle s’est installée naturellement quand les œuvres se sont faites sœurs sur les murs du Salon. Pour elle, il y a Jalal Bin Thaneya qui nous immerge dans ses explorations industrielles et nous parle de la fin d'une époque, tandis qu’Ola Allouz nous montre un bout de l’intime, sa terrasse sur fond de ville dubaïote ; et Faisal Alrais, lui, brise le quatrième mur, celui où l’œil de l’artiste se terre. Chacune des œuvres présente selon la galeriste des éléments qui peuvent traverser le spectateur, d’où qu’il vienne.

Photo de l’œuvre nommée « Looking I » de l’artiste émiratie Fatima Albudoor. Photo Société nationale des beaux arts.

Le responsable de la scénographie des photos, Lo Kee, ne cache pas sa surprise après l’accrochage des œuvres. La résurgence du portrait comme genre est frappante. Un horizon de questionnement est formulé : « Est-ce il n’y a pas un retour vers des choses qui nous parlent à tous ? C’est-à-dire la personne en face de soi, les autres ? » Pour lui, parmi les artistes émiratis, c’est tout en subtilité que s’exprime l’universel : « Fatima Albudoor, c’est le bras qui dépasse de la fenêtre, je trouve ça extrêmement sensible, très poétique. Je ne saurais pas dire que cette femme est émiratie, à la rigueur, cela n’a pas d’importance, j’aime la façon dont c’est fait. »

Donner à voir les propositions de la jeunesse émiratie

Il y avait l’intention chez les organisateurs de « lever le voile » sur ce flou que pouvait représenter la scène artistique émiratie. Dépasser les préconçus sur le pays du Golfe et montrer la vitalité artistique de la jeunesse : « Vu de France, c’est rapporter beaucoup d’imaginaire. Mais là avec les photographies d’artistes talentueux, c’est du concret, tout d’un coup je peux presque dialoguer avec eux, ils m’envoient un message et c’est plus tangible que des faits rapportés par la presse », dit Lo Kee.

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Susciter la curiosité, (re)découvrir l’« Autre » est une ambition franchement marquée par le Salon cette année. Dans l’espace « Photographie » se répondent des œuvres saisissantes venant des quatre coins du globe, et chacune des autres sections regorge de propositions riches. L’Orangerie se voudra cette fois-ci comme une pause artistique dans la ville, un espace solaire et accessible : l’art par les artistes et surtout pour tous et toutes. L’entrée en est gratuite et Isabelle Lawson espère que la course du jogger ou la promenade des adolescents et des familles se termineront dans le Salon.

Le corner émirati et les sections Naturaliste, Papier-Papiers, Photographie, Sculpture seront ouvertes jusqu’au dimanche 23 juin, et la section Peinture et Sculpture prendra le relais du 26 au 30 juin. Conseil du photographe Lo Kee pour faire un détour au Salon : Se laisser immerger, voir et re-revoir les images parce que le voyage mûrit face aux œuvres d’art ! 

À l’occasion des 160 ans de la Société nationale des beaux arts, l’institution revient au lieu symbolique qui l’a vu naître, dans le Jardin du Luxembourg, à Paris. Cet espace originellement voué à la culture de plantes rares a conservé son air exotique pour accueillir des artistes du monde entier ; et pour la première fois, une délégation arabe venant des Émirats arabes...
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