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Dernières Infos - Crise

Iranien détenu en France et menacé d'expulsion: agitation politique et judiciaire

Un drapeau de l'Iran. Photo d'archives AFP

Un ressortissant iranien est en détention administrative en France, sous le coup d'une expulsion que son avocat juge « politique » et que des opposants iraniens tentent de bloquer pour le juger, sur fond de relations bilatérales extrêmement tendues.

Arrêté à Dijon (centre) le 3 juin et placé dans un centre de rétention administrative à Metz (est), Bashir Biazar est présenté par le site Iran International, basé à Londres, comme un ancien responsable de la télévision publique iranienne IRIB. Les médias d'Etat iraniens, eux, le qualifient de « figure culturelle ».

A Paris, une source policière a indiqué à l'AFP qu'une « procédure d'expulsion » avait été enclenchée à son encontre « notamment parce qu'il a tenu publiquement des propos anti-français », sans en préciser la nature.

Les ministères français des Affaires étrangères et de l'Intérieur n'ont pas répondu aux questions de l'AFP.

Bashir Biazar a manifesté un fort activisme pro-palestinien sur les réseaux sociaux. Il « s'est exprimé sur son compte Instagram comme n'importe qui pourrait le faire librement dans un Etat de droit », a expliqué à l'AFP son avocat Me Rachid Lemoudaa

Son client, qui selon lui a l'intention « d'entamer une grève de la faim », fait l'objet d'un arrêté d'expulsion mais sa rétention a été prolongée de 28 jours le 6 juin. « Je n'ai rien vu qui justifie (son maintien) en rétention : les vols (pour l'Iran) sont disponibles », fait valoir l'avocat.

« Je pense que cette procédure est politique, et la politique n'a rien à faire dans le droit ».

« Complicité de torture 

Cette affaire intervient alors que trois Français sont encore emprisonnés en Iran, qualifiés par Paris « d'otages d'Etat ».

Cécile Kohler et Jacques Paris, arrêtés en mai 2022, sont accusés par Téhéran d'être des espions. Un prénommé Olivier, dont le nom de famille et les chefs d'accusations retenus contre lui n'ont pas été rendus publics, est également emprisonné.

Un autre Français, Louis Arnaud, détenu en Iran depuis septembre 2022, a été libéré la semaine dernière, sans contrepartie connue.

Le 5 juin, évoquant le cas de M. Biazar, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Nasser Kanani, avait promis de prendre les « mesures nécessaires » pour qu'il soit libéré « aussi rapidement que possible ».

Kazem Gharibabadi, président du Haut Conseil iranien pour les droits de l'homme, organe proche du régime, a de son côté dénoncé la décision « illégale » de la justice française.

« Le billet retour lui a été préparé et son départ n'est pas interdit par la loi, alors pourquoi la France continue-t-elle de détenir arbitrairement ce citoyen iranien ? », a-t-il ajouté.

Selon l'hebdomadaire français Le Point, Bashir Biazar serait considéré par Paris comme un agent d'influence.

« Quand on soupçonne quelqu'un d'être un agent d'influence ou un espion, pourquoi on ne va pas perquisitionner chez lui ? Pourquoi on ne va pas voir s'il porte vraiment une menace ? (...). Rien de tout cela n'a été fait », assure son avocat.

L'affaire a pris une autre tournure judiciaire jeudi avec la plainte déposée à Paris contre X et contre M. Biazar par des « militants franco-iraniens des droits humains, anciens prisonniers politiques arbitrairement détenus, condamnés et torturés par la République islamique d'Iran ».

La procédure, consultée par l'AFP, porte sur les chefs de « complicité (...) d'actes de torture psychologique, physiques, traitements cruels, inhumains et dégradants » ainsi qu' »intelligence avec une puissance étrangère », selon un communiqué envoyé à l'AFP par leur avocate Chirinne Ardakanni.

Me Ardakanni, qui défend aussi la lauréate du prix Nobel de la paix Narges Mohammadi, détenue à la prison d'Evin de Téhéran, s'oppose à l'expulsion de l'Iranien afin qu'il soit jugé.

L'enquête et, le cas échéant, « les poursuites qui en découleraient doivent nécessairement faire obstacle à son expulsion », estime l'avocate dans le communiqué. A défaut, « les nombreuses victimes de la République islamique d'Iran perdraient l'occasion d'obtenir vérité et justice ».

La semaine dernière, au terme d'un accord entre Téhéran et Stockholm, deux Suédois dont un diplomate de l'Union européenne ont été libérés d'Iran en échange d'un ex-haut responsable de l'administration pénitentiaire iranienne qui purgeait une peine de prison à vie en Suède.

Quelques jours plus tard, l'universitaire irano-suédois Ahmadreza Djalali, dans le couloir de la mort en Iran depuis huit ans, a demandé des comptes au Premier ministre suédois Ulf Kristersson, l'accusant de l'avoir « laissé ici (en Iran, ndlr), sans défense ».

Un ressortissant iranien est en détention administrative en France, sous le coup d'une expulsion que son avocat juge « politique » et que des opposants iraniens tentent de bloquer pour le juger, sur fond de relations bilatérales extrêmement tendues.Arrêté à Dijon (centre) le 3 juin et placé dans un centre de rétention administrative à Metz (est), Bashir Biazar est...