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Politique - Entretien

Alexandre Rodakov : La présidentielle libanaise doit se faire sans ingérence extérieure

De Beyrouth à Gaza en passant par la Syrie, l’Iran et l’Ukraine, l’ambassadeur de Russie à Beyrouth répond, par écrit, aux questions de « L’Orient-Le Jour ».

Alexandre Rodakov : La présidentielle libanaise doit se faire sans ingérence extérieure

L’ambassadeur de Russie à Beyrouth Alexandre Rodakov. Photo DR

Depuis votre arrivée au Liban, vous êtes plutôt discret. Y a-t-il un changement dans la politique russe à l’égard de Beyrouth ?

Cette année, nous célébrons le 80e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Russie et le Liban. Nos deux pays sont déterminés à renforcer la coopération dans tous les domaines. Malheureusement, au stade actuel, un certain nombre de facteurs objectifs sont apparus qui ne nous permettent pas d’atteindre la dynamique souhaitée : d’une part, l’absence de pouvoir exécutif présidentiel dans le pays, d’autre part, l’instabilité dans la région du Moyen-Orient.

Pourquoi la Russie n’est-elle pas membre du quintette qui vise à débloquer la présidentielle ?

La Russie applique strictement le principe de non-ingérence dans les affaires des États souverains. L’élection d’un nouveau président du Liban devrait être ainsi décidée par les Libanais eux-mêmes. Les pays occidentaux entretiennent des liens avec quelques hommes politiques libanais, tout en essayant simultanément de contrecarrer les autres forces politiques au Liban. De telles manœuvres dangereuses font partie du jeu géopolitique néocolonial de l’Occident traditionnel. Elles ont d’ailleurs provoqué l’aggravation de la crise régionale actuelle. Nous prenons donc nos distances avec les activités du « quintette ». Cependant, la Russie ne reste pas à l’écart. Nous entretenons des contacts étroits avec l’ensemble de la classe politique libanaise et nous la soutenons chaque fois que cela est possible.

Le dossier des migrants et réfugiés syriens occupe une place de plus en plus importante au Liban. La Russie ne peut-elle pas intervenir auprès des autorités syriennes pour tenter de le régler ?

Permettez-moi de vous rappeler qu’en 2018, la Russie a pris l’initiative d’organiser une coopération internationale visant au retour des réfugiés syriens en Syrie. Un centre d’accueil, de distribution et d’hébergement des réfugiés y a été ouvert. Un siège de coordination interministériel entre les ministères russes de la Défense et des Affaires étrangères a été mis en place et il s’efforce également de résoudre ce problème. En novembre 2020, une conférence internationale sur le problème des réfugiés syriens s’est tenue à Damas. Nous continuons à chercher des moyens de résoudre ce problème lors des rencontres internationales sur la Syrie dans le cadre du « format Astana (Russie, Iran, Turquie) ». Nous constatons toutefois l’existence de tentatives politisées de la part des pays occidentaux pour empêcher les réfugiés de rentrer chez eux en Syrie et la restauration de cet État détruit par la longue guerre contre le terrorisme international.

Pourquoi la compagnie russe Novatek s’est-elle retirée du consortium chargé de la prospection dans le bloc 4 ?

Novatek est une société commerciale privée. La décision de participer à un projet particulier ou de s’en retirer est prise de manière indépendante par sa direction, selon sa vision de la faisabilité économique.

Quelle est la position de la Russie par rapport à ce qui se passe à Gaza ?

Nous faisons ce que nous pouvons pour parvenir rapidement à un cessez-le-feu durable à Gaza. La Russie est l’un des partisans les plus constants d’une solution à deux États du conflit palestino-israélien. Nous votons sans hésitation en faveur de toutes les résolutions de l’ONU qui soutiennent franchement, sans « double fond » ni « agenda caché », une telle solution et visent une cessation immédiate, complète et durable des hostilités.

À plusieurs reprises au cours des derniers mois, des responsables du Hamas se sont rendus à Moscou. Pourquoi ?

La Russie entretient des relations avec toutes les parties du conflit à Gaza, y compris le mouvement national palestinien Hamas. Nous condamnons tant l’attaque du 7 octobre 2023 sur le territoire israélien que la punition collective infligée à la population de Gaza. Grâce à nos contacts avec les représentants du Hamas, des otages ont été libérés. Nous poursuivons les efforts dans ce sens. La priorité est désormais à un cessez-le-feu à Gaza. Il faudra ensuite lancer un processus de négociation afin de régler le conflit palestino-israélien. Pour en arriver là, la fracture interpalestinienne doit être surmontée. Nous espérons que l’impulsion donnée à Moscou pour un processus de réconciliation interne se développera davantage.

On dit que la Russie est proche des Arabes alors que les États-Unis sont proches d’Israël. Mais qu’a-t-elle fait pour les Arabes au cours de la dernière décennie ?

La Russie estime que les relations internationales doivent être construites sur une base à la fois de respect et d’intérêt pour toutes les parties. Autrement dit, nous sommes au moins déterminés à ne faire de mal à personne. Toutefois, je peux vous rappeler ce que la Russie a fait pour le monde arabe au cours de la dernière décennie. D’abord, elle a contribué de façon décisive à la défaite de l’État islamique en 2015 en Syrie. L’armée russe a empêché les terroristes de s’emparer d’autres pays de la région, à commencer par le Liban.

La Russie a organisé et accueilli de nombreux événements internationaux visant à surmonter les défis auxquels sont confrontés de nombreux États de la région. Nous parlons des problèmes des réfugiés, de la lutte contre la pauvreté, la faim et la propagation des maladies ainsi que de la promotion de l’éducation et du développement, de la lutte contre le terrorisme, le trafic de drogue, la traite des êtres humains et d’autres crimes. La Russie a été parmi les premiers pays à fournir une aide d’urgence aux pays touchés par des catastrophes naturelles ou d’origine humaine. Notamment le Liban, la Libye, la Syrie et d’autres pays de la région. Je pourrais citer encore d’autres exemples. Mais c’est suffisant pour dire que « la Russie est proche des Arabes ».

Y a-t-il des conflits entre l’Iran et la Russie en Syrie ?

La Russie et l’Iran fournissent une assistance à la Syrie suite à une demande officielle du gouvernement syrien. Les prétendus conflits entre eux sont des rumeurs propagées par ceux qui se trouvent illégalement sur le territoire syrien.

La Russie est engagée depuis deux ans dans une guerre contre l’Ukraine, cette situation a-t-elle un impact sur la politique russe dans la région ?

La Russie n’est pas en guerre contre l’Ukraine. A la suite d’un coup d’État illégal en 2014, des éléments radicaux partageant l’idéologie fasciste ont pris le pouvoir dans ce pays. L’extermination de la population russe en Ukraine a été déclenchée. C’est à ce moment que la guerre a commencé. C’était la guerre contre tout ce qui était russe. Pendant 8 ans, on a essayé de régler le conflit par des moyens diplomatiques, mais le camp adverse nous menait par le bout du nez.

Au Moyen-Orient, comme dans la grande majorité des pays du monde, nous sommes généralement compris et soutenus, notre politique étrangère n’a donc pas changé. Par contre, le changement forcé de l’attitude de la Russie à l’égard de « l’Occident » est dicté par la nécessité de répondre à l’agression sans précédent menée contre la Russie par le biais des Ukrainiens.

Depuis votre arrivée au Liban, vous êtes plutôt discret. Y a-t-il un changement dans la politique russe à l’égard de Beyrouth ? Cette année, nous célébrons le 80e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Russie et le Liban. Nos deux pays sont déterminés à renforcer la coopération dans tous les domaines. Malheureusement, au stade actuel, un certain...
commentaires (3)

Waw

Eleni Caridopoulou

17 h 14, le 11 juin 2024

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • Waw

    Eleni Caridopoulou

    17 h 14, le 11 juin 2024

  • Des réponses floues qui collent au statut de tous les diplomates. Chère madame Haddad, vous auriez dû lui demander également combien d’années faudra-t-il encore pour « tenter » de régler le problème des réfugiés.

    Hitti arlette

    13 h 47, le 11 juin 2024

  • L'assassin des Ukrainiens ne trouve rien à redire sur leur agressions ... c'est la même rhétorique mensongère diffusée par un poutine qui est un malade mental. Alors nous vendre qu'il respecte le droit international ...

    Zeidan

    11 h 22, le 11 juin 2024

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