Le ministre sortant de l'Énergie, Walid Fayad, au cours de sa conférence de presse. Photo Mohammad Yassine/L'Orient-Le Jour
Le ministre sortant de l'Énergie, Walid Fayad, a salué jeudi une offre faite par les groupes TotalEnergies et QatarEnergy pour la construction d'une centrale solaire au Liban, et assuré qu'il allait travailler avec son ministère sur l'élaboration d'une proposition concrète sur ce projet.
M. Fayad s'est retrouvé ces jours derniers au centre d'une polémique avec le ministre de l'Économie, Amine Salam. M. Salam avait en effet affirmé, à sa sortie du Conseil des ministres mardi dernier, avoir appris lors d'une visite à Doha l'existence d'un projet qatari pour la construction de « trois centrales » à l'énergie solaire au Liban, auquel Beyrouth n'avait pas donné suite. Il avait reproché à son collègue de l’Énergie d'avoir été absent sur ce dossier et justifié son implication dans un projet énergétique par le fait que « l'économie souffre à cause du secteur de l'énergie ». Revenant sur le sujet lors d'une conférence de presse jeudi, Amine Salam a appelé à ce que les « querelles politiques au Liban » n'entravent pas les projets de développement.
Une seule centrale de 100 mégawatts
Lors de sa propre conférence de presse, tenue peu après celle de M. Salam, Walid Fayad a assuré que l'offre qatarie, qui concerne selon lui la construction d'une seule centrale à l'énergie solaire et non pas trois, « est la bienvenue ». Le projet consisterait dans la construction d'une centrale qui produirait cent mégawatts, et nécessitant un terrain d'« un million de mètres carré environ », soit un kilomètre carré. Il serait réalisé dans le cadre d'un contrat de partenariat « à long terme » entre les secteurs public et privé, et permettrait au privé de vendre du courant à Électricité du Liban (EDL), a-t-il expliqué, ajoutant qu'il ne s'agit « pas d'un don » ou d'une exploitation qui n'aura aucun coût pour le Liban, comme l'a affirmé le ministre Salam plus tôt dans la journée. M. Fayad a affirmé que le projet avait fait l'objet d'une lettre envoyée par les deux compagnies au Premier ministre libanais sortant, Nagib Mikati, durant l'été 2023, et qu'il avait été chargé la semaine dernière de répondre officiellement à cette offre et de préparer une « proposition ». Pour ce faire, un « groupe de travail » a été formé au ministère de l'Énergie, afin de trouver des « solutions sur la question des droits de production, de la vente de l'énergie et des prix de vente ».
Répondant aux accusations du ministre Salam, il a appelé « les personnes concernées à jouer leur rôle pour favoriser la réussite du projet, et s'adresser directement aux spécialistes pour obtenir des informations, et non aux médias ». «Il faut mettre un terme aux surenchères», a-t-il déclaré.
« Offre d'investissement unique »
Le ministre de l'Énergie a enfin remercié le Qatar et TotalEnergies de se tenir aux côtés du Liban en proposant « une offre d'investissement unique ». Reprenant le discours du courant aouniste, dont il est proche, il a affirmé que le Liban est « soumis à un blocus financier, local et international depuis cinq ans, qui (le) prive de tout investissement », alors que la communauté internationale appelle Beyrouth à mener une série de réformes depuis avant même le début de la crise, en 2019. Malgré cela, « le Qatar est resté fidèle au Liban et s'est tenu à nos côtés en 2006, pour la reconstruction, comme il le fait maintenant ». En 2006, après une guerre entre le Hezbollah et Israël, le Qatar avait aidé à la reconstruction du Liban-Sud grâce à plusieurs projets et financements, pour plusieurs centaines de millions de dollars.
Le Qatar s'impose de plus en plus comme un médiateur au Moyen-Orient et entretient de bonnes relations avec toutes les forces politiques au Liban, tout en tentant notamment de revenir sur la scène via le secteur de l'énergie. En janvier 2023, QatarEnergy avait ainsi rejoint le français TotalEnergies et l'italien Eni en tant que partenaire du consortium chargé de commencer l'exploration des hydrocarbures dans les blocs offshore 4 et 9 de la zone économique exclusive (ZEE) du Liban, après le départ du russe Novatek.
Au Liban, le fournisseur public de courant, Électricité du Liban, ne fait tourner que la moitié de ses centrales, le vide étant comblé par des générateurs collectifs au diesel doublés d'un parc photovoltaïque installé à la hâte en pleine crise. Les problèmes structurels d'EDL ont été exacerbés par la crise socio-économique que traverse le pays depuis plus de quatre ans. Cependant, la situation semble s'améliorer après que les autorités ont décidé, à la fin de 2022, d'augmenter les tarifs qui étaient restés inchangés depuis 1994.
Un million de mètres carrés ? Où ça ?
11 h 42, le 31 mai 2024