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Société - Sécurité sanitaire des aliments

Lait infantile non conforme au Liban : le Parlement se saisit du dossier

Sur base d’une étude du CNRS libanais, la commission parlementaire de la Femme et de l’Enfant a demandé aux ministères de la Santé et de l’Économie de prendre des mesures.

Lait infantile non conforme au Liban : le Parlement se saisit du dossier

L'étude a porté sur 117 produits alimentaires pour enfants, présents sur le marché libanais. Photo João Sousa

L’affaire du lait infantile qui serait non conforme aux normes sur le marché libanais a pris de l’ampleur cette semaine, avec une réunion au Parlement jeudi (la deuxième en deux semaines) de la commission de la Femme et de l’Enfant, à la demande de sa présidente, Inaya Ezzeddine. Cette réunion portait sur les résultats d’une étude publiée il y a un an par Maha Hoteit, docteure en sciences de la nutrition et coordinatrice du département des sciences des aliments au Conseil national de la recherche scientifique (CNRS). Cette étude avait porté sur 117 produits alimentaires pour enfants vendus actuellement sur le marché local, montrant qu’une grande partie n’est pas conforme aux normes requises en matière de présence de graisses saturées, d’huile de palme ou encore de sucres ajoutés.

Cette étude a été publiée sous forme d'article dans un journal scientifique en 2023, sur base de tests sur des échantillons prélevés en 2021 et 2022. « Quand un article du Guardian a révélé que des produits d’une grande marque d’agroalimentaire exportés dans des pays pauvres étaient de bien moindre qualité que ceux consommés dans les pays riches, nous avons mis en avant cette étude à la demande des parties intéressées », indique à L’Orient-Le Jour Tamara el-Zein, secrétaire générale du CNRS.

Pour mémoire

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Que dit l’étude en question ? Elle a trouvé que sur les 117 marques testées, il y a une teneur en acides gras saturés élevée dans les préparations pour nourrissons et les céréales lactées. Une haute teneur en sucres a été constatée surtout dans les laits pour les âges d’un à trois ans. La proportion de glucose est la plus élevée dans les préparations pour nourrissons, suivie par celle de fructose pour nourrissons en croissance (alors qu’elle devrait être nulle en principe). La quantité de sucres et de protéines est en général très élevée dans tous les produits (souvent de marques connues), à des degrés divers.

Plus grave encore, poursuit le texte, « la comparaison avec le contenu de l'étiquetage nutritionnel de chaque produit a révélé que la majorité des produits présentent des incohérences par rapport à la teneur réelle en nutriments et que certains d'entre eux contiennent des éléments non déclarés ». « La plupart des produits présentent un écart de 0,5 % à 46 % entre l'étiquette et les valeurs obtenues en laboratoire », poursuit l’article.

« À long terme, la consommation de produits riches en graisses saturés, sucres ajoutés et huile de palme pourrait favoriser l’émergence de maladies cardiaques et métaboliques, à l’instar de l’obésité ou du diabète », souligne Maha Hoteit à L’Orient-Le Jour.

Prélèvement d’échantillons dès lundi

À l’issue de la réunion de jeudi au Parlement, Inaya Ezzeddine a précisé que « la commission a envoyé des lettres officielles aux ministères de la Santé et de l’Économie afin de leur demander de prendre des mesures en vue de déterminer l’état du marché du lait infantile, d’une part, et de retracer le cheminement des produits en question de leur pays d’origine jusque dans les foyers libanais, d’autre part ».

La députée a demandé que « les ministères informent la commission des résultats des tests (qu’ils effectueront sur des échantillons) en vue de s’assurer de la conformité des différentes marques aux normes en vigueur au Liban ».

À L’Orient-Le Jour, Mme Ezzeddine explique ce qu’elle entend par « mesures ». « Le ministère de la Santé est concerné par le lait infantile pour enfants de moins d’un an, et parce que ce produit est considéré comme un médicament, nous lui demandons de mener une enquête sur les marques actuellement sur le marché et sur la façon dont ces produits se sont retrouvés chez nous », dit-elle. Ce ministère, précise-t-elle, a envoyé une représentante à la première réunion qui a affirmé « vouloir revoir les données détenues par son administration ». Elle n’était pas présente à la seconde pour cause de voyage. Nous avons tenté de contacter le ministère en vue d’obtenir plus de réponses, sans succès.

La présidente de la commission parlementaire de la Femme et de l'Enfant, Inaya Ezzeddine (première à droite) au cours de la réunion de jeudi. Photo ANI

Selon la députée, le ministère de l’Économie a promis de mettre en place de nouveaux tests. Une source proche du dossier indique que bien que l’affaire soit en principe du ressort du ministère de la Santé, le directeur général du ministère de l’Économie, Mohammad Abou Haïdar, a réclamé que les résultats des tests et les listes de produits lui soient envoyés dès lundi prochain. Il compterait ainsi demander aux observateurs affiliés à son administration de prélever des échantillons des marques citées dans l’étude en vue de nouveaux tests à la lumière desquels des directives seront données. De son côté, autant Inaya Ezzeddine que Tamara el-Zein ont affirmé avoir requis que de nouveaux paramètres soient ajoutés aux futurs tests, comme le calcul du taux des résidus de pesticides les plus dangereux pour la santé, ainsi que les mycotoxines (toxines produites par certains champignons).

Une priorité de santé publique

Les mesures pourraient-elles arriver au point de retirer certains produits des marchés ? « Jusqu'ici, nous n’avons aucune donnée et on ne nous a informé de rien », nous assure Joe Salloum, président de l’ordre des pharmaciens. Il rappelle que les pharmacies achètent des produits importés par des sociétés reconnues et autorisées par le ministère de la Santé, et qu’elles n’ont pas les moyens de vérifier elles-mêmes la qualité du contenu. « Nous nous conformerons à toute directive de retrait d’un lait pour enfants du marché », assure-t-il cependant.

L’étude de Maha Hoteit ayant montré que la grande majorité des produits testés présentent des irrégularités, l’affaire pourrait devenir un casse-tête pour les parents, étant donné que le lait infantile est un produit impossible à remplacer. « Pour ma part, j’insiste sur la nécessité d’encourager l’allaitement le plus longtemps possible, ce qui passe par une révision de la durée du congé maternité », souligne l’experte.

Dans la jungle d’insécurité sanitaire des aliments du pays, cette affaire est « prioritaire », insiste Tamara el-Zein, au vu de l’impact sur les nourrissons et des conséquences à long terme sur les adultes qu’ils deviendront. 

L’affaire du lait infantile qui serait non conforme aux normes sur le marché libanais a pris de l’ampleur cette semaine, avec une réunion au Parlement jeudi (la deuxième en deux semaines) de la commission de la Femme et de l’Enfant, à la demande de sa présidente, Inaya Ezzeddine. Cette réunion portait sur les résultats d’une étude publiée il y a un an par Maha Hoteit, docteure en...
commentaires (1)

Rst ce que l'Etude libanaise confirme les résultats publiés dans The Guardian? Est ce que le contenu des boites commercialisées dans les pays développés est différent de celles commercialisées au Liban? Cette ou ces marques a un agent au Liban. Il est peut etre normal qu'il réponde par exemple devant une commission parlementaire...

Moi

22 h 27, le 20 mai 2024

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Commentaires (1)

  • Rst ce que l'Etude libanaise confirme les résultats publiés dans The Guardian? Est ce que le contenu des boites commercialisées dans les pays développés est différent de celles commercialisées au Liban? Cette ou ces marques a un agent au Liban. Il est peut etre normal qu'il réponde par exemple devant une commission parlementaire...

    Moi

    22 h 27, le 20 mai 2024

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