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Société - Justice

Nader Saab appelé à comparaître devant le tribunal pénal

Cinq ans après le drame ayant coûté la vie à une Jordanienne de 33 ans, morte à la suite d’opérations subies dans la clinique du chirurgien plasticien, celui-ci fait l’objet d’un acte d’accusation pour négligence et non-respect des règles médicales.

Nader Saab appelé à comparaître devant le tribunal pénal

Farah Kassab, mère de deux enfants, dans cette photo qui a largement circulé au moment des faits. Photo tirée de Facebook

Le décès de Farah Kassab, une Jordanienne de 33 ans mère de deux enfants, le 31 mai 2017, suite à plusieurs interventions chirurgicales subies le jour même dans la clinique de chirurgie esthétique du Dr Nader Saab (Naccache – Metn), serait dû à la négligence et au non-respect des règles médicales par le chirurgien plasticien. Tel est le grief fondamental invoqué dans l’acte d’accusation rendu le 26 mai par le juge d’instruction du Mont-Liban Hanna Breidi sur base de l’article 564 du code pénal et d’articles du code de déontologie médicale. Le médecin ainsi qu’une infirmière, Éliane Khoury, également accusée de négligence, ont été déférés devant le juge pénal unique du Metn. Si ce dernier les déclarait responsables, ils encourraient chacun une peine allant de six mois à trois ans de prison.

Faute postopératoire

À la lecture du jugement dont L’Orient-Le Jour a obtenu une copie, il apparaît que la jeune femme est décédée d’une embolie graisseuse pulmonaire, c’est-à-dire en raison de la présence d’un caillot de graisse dans les veines des poumons. Une complication qui survient dans 15 % des cas de simultanéité d’opérations chirurgicales et de durée prolongée de ces interventions. En l’espèce, Farah Kassab avait subi une liposuccion de la taille, du ventre, des fesses et des genoux, ainsi qu’une rhinoplastie et une injection de botox dans l’estomac. Autant d’interventions qui avaient duré plus de trois heures, approximativement de 6h30 à 10h. Mais le juge ne reproche ni la pluralité des gestes chirurgicaux ni leur étendue dans le temps, encore moins la quantité de graisses aspirées. Ce dont il accuse le Dr Saab, c’est de n’avoir pas pris de mesures médicales pour faire face aux complications susceptibles de surgir dans de telles conditions. L’erreur du médecin n’est donc pas technique, mais postopératoire. Autrement dit, le plasticien a fait un bon geste chirurgical, mais n’a pas accompagné sa patiente lors de l’étape qui a suivi. Dans les motifs de sa décision, Hanna Breidi note en effet que le dossier médical de la jeune femme était vide de toute information sur des soins et médicaments qui lui auraient été fournis lorsque son état avait commencé à se détériorer vers 13h. De l’aveu même du Dr Saab, interrogé au poste de police d’Antélias (Metn) au surlendemain du drame, l’état de Farah Kassab avait périclité à partir de ce moment, soit environ deux heures après avoir été transférée dans sa chambre vers 11h. Or aucun indice dans le dossier ne montre, par exemple, que la jeune femme a bénéficié entre 14h et 15h d’une surveillance au niveau du taux d’oxygène ou de la mesure du pouls, alors que sa tension artérielle avait chuté de 14/8 à 10/6 et que sa fréquence cardiaque était passée de 70 à 90 battements par minute. Lorsque, après plus d’une heure d’absence, l’infirmière est entrée (vers 15h) dans la chambre de la malheureuse, elle a constaté que son pouls avait faibli à tel point qu’il était imprenable.

Pas de soins intensifs

Pour rappel, Farah Kassab avait alors été transportée dans une ambulance jusqu’à l’hôpital Notre-Dame du Liban à Jounié. Selon une source judiciaire interrogée par L’OLJ, elle était déjà décédée lorsque Nader Saab avait décidé de la transporter. Le ministre de la Santé de l’époque Ghassan Hasbani avait d’ailleurs publié au lendemain du drame un communiqué indiquant que la jeune Jordanienne était arrivée morte à Jounié.

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Outre l’erreur de suivi, le juge Breidi évoque une faille dont pâtissait l’infrastructure hospitalière de la clinique au moment des faits, en l’occurrence l’inexistence d’un service de soins intensifs tant au plan des équipements que celui du personnel. Depuis lors, la clinique a vraisemblablement pallié ce manque, le ministre de la Santé de l’époque ayant décidé, quelques jours après le drame, d’interdire à tout hôpital non équipé d’une unité de soins intensifs des opérations chirurgicales susceptibles de provoquer des complications nécessitant de tels soins.

Retard du Conseil de l’ordre des médecins

Cinq ans après le drame, l’acte d’accusation du juge d’instruction est donc enfin publié. Dans un contexte judiciaire fortement critiqué, beaucoup n’y croyaient plus. Selon un magistrat interrogé par notre journal, ce retard est dû à plusieurs facteurs, dont des recours en dessaisissement successifs contre le juge d’instruction, qui, même s’ils se sont soldés au final par des échecs, ont eu pour effet de ralentir l’enquête. Également en cause, le confinement imposé par la propagation du Covid-19, et les grèves longtemps observées par les magistrats, les auxiliaires de justice et les avocats.

Enfin, et tel est le motif le plus important du décalage de la décision de Hanna Breidi : lors du mandat de l’ancien président de l’ordre des médecins Raymond Sayegh, les résultats de l’enquête établis par la commission d’investigation au sein de l’ordre n’avaient été approuvés ni par le conseil de l’ordre ni par son président. Le juge d’instruction ne disposait donc pas d’un rapport officiel final, mais seulement de procès-verbaux des séances tenues par la commission. En avril dernier une nouvelle enquête a obtenu l’approbation du successeur du Dr Sayegh, Charaf Abou Charaf, aboutissant enfin à l’obtention par Me Breidi d’un document sur lequel il a pu se fonder aux côtés d’autres preuves, à l’instar des rapports de médecins légistes, de laboratoires et de la commission médicale au sein du ministère de la Santé.

Le décès de Farah Kassab, une Jordanienne de 33 ans mère de deux enfants, le 31 mai 2017, suite à plusieurs interventions chirurgicales subies le jour même dans la clinique de chirurgie esthétique du Dr Nader Saab (Naccache – Metn), serait dû à la négligence et au non-respect des règles médicales par le chirurgien plasticien. Tel est le grief fondamental invoqué dans l’acte...
commentaires (2)

Ils ont fait mettre un équipement de soins intensifs dans les cliniques privées? Mais un équipement a besoin de réanimateur!!!!! La réanimation est une spécialisation à part entière! Et entendons-nous les cliniques de chirurgie plastique qui effectuent des chirurgies aussi risquées ne sont pas des hôpitaux et ont pour seul but de renflouer un peu plus les poches du plasticien plutôt qu'une partie de l'argent aille à l'hôpital. Des plasticiens qui se respectent et qui refusent de mettre la vie des patientes en jeu on en connait plein. Pour aucune considération au monde ils ne font de compromis sur la sécurité de leurs patients. Mais des charlatans au diplôme douteux on en connait encore plus, par ailleurs soutenus par des dirigeants non moins corrompus. Mr Saab devrait expliquer au public pourquoi son diplôme a causé tant de controverses au sein de la société de chirurgie plastique qui refusait de l'inscrire en tant que membre, et révéler aussi pourquoi l'enquête a tant tardé... Des gens comme lui auraient dû avoir leur clinique fermée depuis belle lurette plutôt que de leur imposer de créer une unité de soins intensifs!!! Mais pour être opérée par quel spécialiste??? L'anesthésiste? Pour faire quoi, temporiser en attendant le transfert à l'hôpital, en faidant perdre des minutes précieuses au patient? Erreur monumentale! une liste des interventions non permises ds les cliniques privées aurait dû être dressée avec des contrôles stricts. USI en ville je rigole!

C EL K

16 h 06, le 04 juin 2022

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Commentaires (2)

  • Ils ont fait mettre un équipement de soins intensifs dans les cliniques privées? Mais un équipement a besoin de réanimateur!!!!! La réanimation est une spécialisation à part entière! Et entendons-nous les cliniques de chirurgie plastique qui effectuent des chirurgies aussi risquées ne sont pas des hôpitaux et ont pour seul but de renflouer un peu plus les poches du plasticien plutôt qu'une partie de l'argent aille à l'hôpital. Des plasticiens qui se respectent et qui refusent de mettre la vie des patientes en jeu on en connait plein. Pour aucune considération au monde ils ne font de compromis sur la sécurité de leurs patients. Mais des charlatans au diplôme douteux on en connait encore plus, par ailleurs soutenus par des dirigeants non moins corrompus. Mr Saab devrait expliquer au public pourquoi son diplôme a causé tant de controverses au sein de la société de chirurgie plastique qui refusait de l'inscrire en tant que membre, et révéler aussi pourquoi l'enquête a tant tardé... Des gens comme lui auraient dû avoir leur clinique fermée depuis belle lurette plutôt que de leur imposer de créer une unité de soins intensifs!!! Mais pour être opérée par quel spécialiste??? L'anesthésiste? Pour faire quoi, temporiser en attendant le transfert à l'hôpital, en faidant perdre des minutes précieuses au patient? Erreur monumentale! une liste des interventions non permises ds les cliniques privées aurait dû être dressée avec des contrôles stricts. USI en ville je rigole!

    C EL K

    16 h 06, le 04 juin 2022

  • Bonjour C’est pas vrai que le président de L’ordre Pr Raymond Sayegh n’a rien fait . Il n’a pas signé le rapport émis par le comité scientifique présidé a l’époque Par Dr Mariam Raja. Il a meme appelé à sa démission du fait de ses déclarations médiatiques erronées. Prière de corriger et vérifier avant d’écrire l’article

    Nicole Sayegh

    07 h 01, le 04 juin 2022

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