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Économie - Finances publiques

De nouvelles règles pour l’imposition des contribuables non résidents au Liban

Un décret publié hier comble de vieilles lacunes juridiques, afin de permettre à l'État d'augmenter ses recettes et au Liban de remplir les nouvelles exigences internationales de transparence fiscale.

Avec ce nouveau décret, le ministère des Finances cherche notamment à limiter le nombre de contribuables pouvant potentiellement échapper à l’impôt sur le revenu. Photo C.Hd.

En proie à un déficit public chronique depuis plusieurs années – estimé à 1,44 milliard de dollars au premier trimestre (+35,7 %) –, l'État libanais cherche à augmenter les recettes fiscales en limitant le nombre de contribuables qui peuvent potentiellement échapper au paiement de l'impôt sur le revenu.
Tel est notamment l'objectif du décret n° 3692 publié hier au Journal officiel (JO) et qui s'emploie à préciser les modalités d'application des articles 41 à 43 relatifs à l'imposition des non-résidents du décret législatif n° 144 du 12 juin 1959 régissant l'impôt sur le revenu.

 

Combler des lacunes
« Les dispositions du décret réduisent les cas de figure où un contribuable peut être imposé comme un non-résident et augmentent par conséquent l'assiette de ceux qui seront assujettis à l'impôt progressif sur le revenu », indique le PDG de FFA Private Bank, Jean Riachi. « L'État augmente ses recette fiscales sans augmenter les impôts », résume de son côté l'avocat fiscaliste Karim Daher. « Autre objectif, combler les lacunes de la réglementation libanaise dans ce domaine dans le cadre de l'adhésion du Liban (en mai) au Forum mondial et son engagement à appliquer la norme d'échange automatique d'informations fiscales (CRS) de l'OCDE à partir de septembre 2018 », précise-t-il. Contacté par L'Orient-Le Jour, le ministère des Finances – à l'origine du texte – n'a pas répondu à nos demandes de précisions.
Les articles dont les modalités sont détaillées par le nouveau décret instituent un régime d'imposition spécifique pour les non-résidents. Ces derniers étant définis par opposition aux résidents, dont les taux d'imposition sur le revenu net, après déductions et abattements, oscillent entre 4 % à 21 % répartis en cinq tranches. Les articles 41 et 42 disposent notamment que les personnes physiques ou morales ne possédant « pas d'établissement professionnel au Liban » sont considérées comme des non-résidents et doivent s'acquitter d'un impôt forfaitaire à 7,5 % pour la plupart des catégories de revenus. Le décret fixe les modalités d'application de ces dispositions en commençant par définir la notion au moyen de deux critères alternatifs. « Il isole notamment les notions de "lieu fixe" depuis lequel un contribuable exerce une activité dont les revenus peuvent être imposés, ainsi que le caractère occasionnel et "non répétitif" de celle-ci », expose Me Daher.
« Avant l'adoption de ce décret, les modalités d'application des articles 41 à 43 étaient énumérées dans une directive du ministère des Finances datant de 1965 qui n'est plus adaptée au monde actuel », ajoute-t-il. De plus, le fait que les notions de « lieu fixe » et d'activité « non répétitive » pouvaient être différemment appréciées par l'administration fiscale, en fonction des domaines d'activités concernés, pouvaient permettre à certains contribuables de « jouer sur les zones grises » pour diminuer le montant des impôts dont ils devaient s'acquitter. Me Daher précise cependant que « le nouveau décret s'impose sur la directive, même si certaines des dispositions – compatibles – pourront toujours être appliquées ».

 

(Lire aussi : Transparence fiscale : le Liban a-t-il vraiment le choix ?)

 

Portée limitée ?
Selon le décret, le lieu fixe désigne ainsi un local possédé, loué ou mis à la disposition du contribuable, et depuis lequel ce dernier exerce une activité professionnelle (rémunérée) pendant plus de 3 mois au total sur un cycle en comprenant 12. Une durée qui s'étend à 6 mois pour les activités dans le domaine de la construction et du BTP. Le texte insiste également sur le caractère « non répétitif et inhabituel » d'une activité – là aussi sur 12 mois –, même si elle est exercée par un contribuable qui séjourne au Liban. Les rédacteurs du décret illustrent notamment ce critère en évoquant « un peintre qui réalise une toile », suggérant ainsi que ce dernier ne gardera son statut de non-résident que s'il n'honore qu'une commande ponctuelle rémunérée et imposable en l'espace d'un an.
Le texte indique enfin – entre autres précisions – que les dispositions qu'il contient s'appliquent sous réserve des conventions fiscales qui engagent l'État libanais.
« En pratique, le texte vise surtout les intermédiaires, les consultants et les travailleurs occasionnels », estime pour sa part le président du Rassemblement des dirigeants et chefs d'entreprise libanais (RDCL), Fouad Zmokhol. En effet, selon le décret, un consultant qui est employé dans le cadre de plusieurs missions ponctuelles pour des clients différents ne pourra plus échapper aux obligations déclaratives des contribuables redevables de l'impôt sur le revenu. « Il reste que la portée de ce texte reste limitée, en considérant qu'il soit strictement appliqué », estime-t-il.
M. Riachi considère, lui, que les nouvelles modalités ne sont toujours pas assez détaillées. « Il faut attendre l'amendement du code des procédures fiscales (qui doit avoir lieu d'ici à septembre) pour redéfinir les modalités d'application de l'impôt des non-résidents et ainsi écarter les dernières zones d'ombre », conclut-il.

 

 

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commentaires (3)

Il faut plus que l'imposition de nouveaux contribuables pour combler le déficit

Zorkot Mohamed

23 h 16, le 01 juillet 2016

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Commentaires (3)

  • Il faut plus que l'imposition de nouveaux contribuables pour combler le déficit

    Zorkot Mohamed

    23 h 16, le 01 juillet 2016

  • Résidents ou non l'important la transparence et non le vol des biens par des intouchables .

    Sabbagha Antoine

    12 h 29, le 01 juillet 2016

  • commencer par nationaliser les comptes de nos politiciens...surtout ceux a l'etranger qui sont rudement bien garni

    George Khoury

    11 h 25, le 01 juillet 2016

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