Dans le cadre de sa deuxième visite au Liban depuis sa prise de fonctions en janvier, le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, a déclaré qu'il ferait de nouvelles propositions aux responsables libanais afin d'apaiser les tensions entre le Hezbollah et Israël et d'éviter qu'une guerre n'éclate.
Selon une source diplomatique française citée par l'AFP, M. Séjourné s'est rendu au Liban pour "poursuivre les efforts" visant "à éviter une guerre", dans un contexte de "très forte augmentation des tensions depuis l'attaque iranienne contre Israël". La source ajoute que le volume d'échanges de tirs entre Israël et le Hezbollah a été "multiplié par deux" depuis les 13 et 14 avril.
"Si je regarde la situation aujourd'hui, s'il n'y avait pas une guerre à Gaza, on pourrait parler d'une guerre au Sud-Liban compte tenu du nombre de frappes et de l'impact sur la région", a déclaré Stéphane Séjourné après avoir visité la force de maintien de la paix des Nations unies à Naqoura, au Liban-Sud. "Je vais faire passer des messages et faire des propositions aux autorités pour stabiliser cette zone et éviter une guerre", a-t-il ajouté.
Discours à la Résidence des pins
Dans le discours prononcé au terme de sa tournée au Liban, le chef de la diplomatie française, a estimé que la situation s’était bien dégradée au Liban-Sud, selon les propos rapportés par notre journaliste sur place Salah Hijazi. « Il y a quelques semaines, on parlait d’un risque, mais aujourd’hui l’escalade est bien présente », a affirmé le haut responsable français. « Préserver le Liban, c'est la responsabilité de la France », a-t-il ajouté.
« La nuit du 13 au 14 avril (pendant laquelle l'Iran avait lancé ses drones et ses missiles contre Israël, en riposte à l'attaque de son consulat à Damas au début du mois) était un tournant » a estimé le chef de la diplomatie française. « Nous refusons le scénario du pire (...) Personne n'a intérêt à l 'escalade y compris le Hezbollah »a-t-il encore insisté, précisant que le même message était adressé à Israël.
Stéphane Séjourné a aussi indiqué qu’il avait rencontré les responsables de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL), qui « joue un rôle décisif pour éviter le scénario du pire », estimant que toutes les parties devaient lui permettre de mener à bien sa mission. « Nous continuons à appuyer l’armée libanaise, dont le déploiement au Sud est nécessaire pour la stabilité », a poursuivi le chef du Quai d'Orsay, soulignant qu’en février la France avait « proposé une feuille de route qui impliquait l’application pleine et entière de la résolution 1701 des Nations unies ». Cette feuille de route est encore en discussion. « Les observations libanaises sont pleinement prises en compte dans nos efforts », a-t-il encore assuré.
Stéphane Séjourné a enfin fait savoir que les efforts entrepris pour faire aboutir la résolution 1701 « porteront d'autant plus si les institutions libanaises sont là » et que « sans président et gouvernement en exercice, le Liban ne sera pas convié à la table des négociations ». Répondant à une question sur le plan au centre de sa visite, Stéphane Séjourné a botté en touche : « Nous sommes dans une discussion. Avant mon déplacement en Israël je ne pourrais pas répondre à cette question. Mais nous avons consulté les acteurs au Liban et nous consulterons en Israël ». Avant de relever : « Je vois dans les propos des autorités libanaises que nous sommes sur la bonne voie ».
Visites chez Berry et Mikati
Avant ce point de presse, le chef du Quai d'Orsay s'était entretenu ce dimanche avec plusieurs responsables politiques libanais, dont le Premier ministre sortant, Nagib Mikati, au Grand Sérail, après avoir rencontré le président de l'Assemblée Nationale, Nabih Berry, à Aïn el-Tiné (une visite qui a eu lieu aux environs de 13h), son homologue libanais Abdallah Bou Habib (qu'il a rencontré entre 15 et 16h), ou encore le chef des Armées, le général Joseph Aoun.
Dans des déclarations figurant dans un communiqué publié à l'issue de la réunion avec M. Séjourné, le président du Parlement a remercié la France pour ses efforts visant à prévenir une guerre au Liban, soulignant la volonté des autorités libanaises de mettre en oeuvre « tous les aspects » de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU.
M. Berry a également évoqué les attaques israéliennes au Liban, notamment dans le sud du pays, au moyen d'une carte qui fait ressortir les pertes humaines et matérielles des bombardements, dont certains ont été effectués avec des armes comme les munitions au phosphore blanc, qui est très strictement limité par le droit international.
« Le Liban attend de recevoir la proposition française visant à la désescalade, à l'arrêt des combats et à la mise en œuvre de la résolution de l'ONU en vue de l'étudier et d'y répondre », a assuré le chef du Législatif au ministre Séjourné. Il a également soulevé le dossier de la présidentielle, bloquée depuis octobre 2022, et celui des déplacés syriens, qui est au devant de l'actualité ces dernières semaines.
Au Grand Sérail, Nagib Mikati et Stéphane Séjourné - venu accompagné de l'ambassadeur de France Hervé Magro et de la directrice du département Afrique du Nord et Moyen-Orient à l'administration centrale du Quai d'Orsay, Anne Grillo (elle-même ancienne ambassadrice au Liban) - ont aussi discuté des efforts entrepris par la France pour rétablir le calme au Sud-Liban et mettre fin à l'offensive israélienne contre la bande de Gaza.
M. Mikati a en outre renouvelé son appel à la France et aux pays européens pour qu'ils soutiennent le Liban afin de trouver une solution à la crise des déplacés syriens, soulignant le début d'une nouvelle approche européenne avec leur reconnaissance du défi que cette question représente pour le pays.
Bou Habib et Lázaro
Le ministre libanais des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, a, lui, déclaré à l'issue de sa rencontre avec son homologue français un peu plus tôt dans la journée : « Nous nous félicitons de l'initiative française et de l'intérêt que Paris porte à la souveraineté et à la stabilité du Liban, en particulier dans le Sud, et nous échangeons des idées sur la manière d'atteindre ces objectifs ». M. Bou Habib a assuré son interlocuteur que le Liban est favorable à la mise en œuvre globale et complète de résolution 1701 afin de parvenir à la stabilité souhaitée.
« Nous avons salué la décision de la France après son vote au Conseil de sécurité en faveur de la reconnaissance de la Palestine en tant que membre des Nations unies. La France est en mesure de jouer un rôle de leader en Méditerranée, et nous comptons sur son assistance à la conférence de Bruxelles pour les déplacés syriens afin de changer l'approche de l'Union européenne sur cette question », a ajouté le ministre libanais.
Un peu plus tôt, le chef de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL), le général de corps d'armée Aroldo Lázaro, avait indiqué sur Telegram avoir lui aussi accueilli le ministre français des affaires étrangères, Stéphane Séjourné. « Nous avons discuté de la situation actuelle et je l'ai remercié pour l'engagement de la France et la contribution de près de 700 soldats de la paix qui travaillent au rétablissement de la sécurité et de la stabilité le long de la Ligne bleue » avait notamment précisé le général.
Résolution 1701
La résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies a été adoptée le 11 août 2006 à l'unanimité des membres, et visait à stopper la guerre entre le Hezbollah et Israël. Elle préconise notamment le retrait des forces israéliennes du Liban, qui seraient remplacées par l'armée libanaise et les Casques bleus déployés dans le sud. Elle exige en outre le désarmement de tous les groupes armés, y compris le Hezbollah, et souligne la nécessité pour le Liban d'exercer un contrôle gouvernemental plein et entier.
En réponse à la première initiative française soumise en janvier, le Liban avait appelé à l'application "pleine et entière" de la résolution 1701 de l'ONU, qui stipule le déploiement seul de l'armée libanaise et des Casques bleus de l'ONU au Liban-Sud.
Washington est également à la manœuvre pour tenter de mettre fin aux violences et dans ce cadre, l'émissaire américain Amos Hochstein est en visite à Jérusalem, alors que le Hezbollah a indiqué à plusieurs reprises qu'il ne mettra fin à ses attaques qu'en cas de cessez-le-feu à Gaza.
Après Beyrouth, Stéphane Séjourné poursuivra sa tournée dans la région à Riyad, en Arabie Saoudite, pour un sommet du Forum économique mondial au cours duquel se tiendront des négociations autour d'un cessez-le-feu à Gaza. Il y retrouvera notamment le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, pour discuter « des efforts en cours visant à parvenir à un cessez-le-feu [...] et prévenir une extension » régionale de la guerre.
En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 382 personnes, dont 259 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils, ont été tuées au Liban, selon un décompte de L'OLJ. Côté israélien, 20 personnes ont été tuées, selon l'armée.
commentaires (4)
Nous avons besoin que les pays occidentaux Israël États Unis et HZ respectent ensemble toutes les résolutions des nations Unis Où est le Liban dans tous ça ? Ça n’existe plus c’est suffisant : HZ représente tous le pays Dommage de résumer ou abréger notre pays à une milice
William SEMAAN
01 h 55, le 30 avril 2024